➽ date et lieu de naissance. 20.02.1978 à Thunder Bay (Ontario, Canada). ➽ nationalité. Canadien ➽ état civil. Séparé. ➽ lieu d'habitation. Stoner Hill. ➽ métier. Mécanicien au Sunco Gazoline. ➽ étiquette qui vous est collée. De par les traits de son visage et son comportement parfois extrême, Kim est celui que l'on préfère avoir comme ami plutôt qu'ennemi. Peu apprécié par la plupart des gens, voire incompris, il est de ceux qui traînent avec des personnes louches - car, forcément, il en est un par conclusion. On le voit avant tout comme une brute qui ne mérite que ce qu'il a. Néanmoins, l'étiquette collée sur son front ne fait pas toujours bonne œuvre.

Chaque jour la question reviens en boucle : « Suis-je vivant ? » Oui, biologiquement parlant, il l'est. Son corps dépasse parfois les 37°c lorsque les virus s'attaquent à son organisme, ou que ses crises refont surface. Il respire, mange, bois. Malgré tout ce que l'on pourra dire là-dessus, Kim est mort. Mort depuis longtemps, torturé par des souvenirs qui ne finissent plus de le tourmenter, assassiné. Cet homme a mal de façon permanente, ses yeux crient cette haine qu'il porte tant aux autres qu'à son égo. Tes yeux font mal. S'il est encore là, ce n'est que parce qu'il doit servir encore à quelque chose - ou que le seigneur est un piètre joueur. Mais à quoi ? Telle est la question. Cependant, pas question de verser de larmes. Il se noie dans d'autres substances, alcool, drogue, et plus sainement huile à moteur. Les pleurs ne sont pas toujours des justificatifs de la souffrance profonde. Dans son cas, elle se traduit de diverses manières, elle se décuple, sans qu'il puisse y faire quoi que ce soit. L'autodestruction est son art, et son pessimisme légendaire ne lui offrira pas plus d'espoir.

Les humains sont ceux qui se sont déchirés entre eux, violé leur propre femmes, égorgé leurs propres enfants…de ça, les autres créatures n'ont plus rien à en apprendre. Oui, Kim est une bête monstrueuse. Son corps est marqué de l'empreinte du démon, celui que personne n'ose pointer du doigt : le Père. Il a souffert, il a rampé pour survivre, et puis lui aussi est devenu Père. Il a frappé, il a mutilé, mais il s'est senti coupable. Et ça le ronge.

Très brutal, cette agressivité permanente est une forteresse semble t-il infranchissable. Personne jusqu'à ce jour n'est parvenu à le calmer ni même le dépêtrer de ce trait de caractère. Un être voué à la violence, une violence impulsive, nette et sans rémission. Guidé par l'instinct dont il ignore l'essence, il se transforme en animal mais parfois en un monstre. Et ce monstre n'est pas là par hasard : il crèche en lui, restant au chaud durant ses heures de calme. La nuit n'étanche pas sa soif. Il en veut toujours plus. Le monstre veut la vengeance, il cherche les pécheurs, les maudits. Il crèche dans l'un d'eux, alors, il le détruit autant que les autres. Ceci a valu bien des malheurs à Kim. Mais pire sont ceux des autres.

Et pourtant, son cœur semble pouvoir aimer. Un amour non conventionnel, rythmé par une affection défectueuse, violente et maladroite. C'est lui qui protège. Personne n'a le droit d'en faire autant sur lui, car sa fierté, bien qu'écaillée, a le mérite d'exister et d'avoir de l'importance. Il se refuse à lécher le sol comme autrefois. Le courage dont il peut faire parfois preuve menace sa survie, mais il se fiche de tout cela : car si survie il y a, meilleure fin il y aura. Il n'aime pas les conseils et reste sur ses propres choix, qu'importe les moyens utilisés pour lui faire changer d'avis. Kim est un âne et c'est tant mieux pour lui. Sauvage et déterminé, il a beau ne plus avoir de but à proprement parler dans la vie, il se laisse emporter par la nature. Il aime les arbres, les fleurs, les animaux…oui, même cet oiseau, là-bas, qui n'arrête pas de chanter d'une mélodie exécrable depuis deux heures. Mais il n'y peut rien. Son hypersensibilité est enfouie au plus profond de lui, et elle danse avec ses peurs, en attendant le jour où il pourra les faire éclore et les assumer.

L'eau est quelque chose qu'il porte en horreur. Elle l'aveugle, l'étouffe, le plonge dans un état proche du désespoir. Même ses crises, ses terreurs nocturnes n'ont rien à envier de cette maîtresse de ses peurs, aqua, la belle danseuse. Mais comme beaucoup de danseuses, c'est une putain. Le monstre en lui en joue, il est fourbe, car il sait tout.

Mais la seule chose qui compte désormais, c'est survivre. Vainement.

Les mains pleines de graisse, l'œil vif, il passe son temps à bichonner autos et motos, bien qu'il préfère les démonter d'une précision chirurgicale. Mécanicien, on pourrait aussi le dire de garagiste, car il s'occupe également des tâches administratives lorsque le gérant est occupé ailleurs. Ce gérant a d'ailleurs une confiance aveugle en Kim, et il fait bien. Car s'il y en a un qui fait bien son travail, c'est lui et personne d'autre. Ses journées, six jours sur sept, il les passe là-bas. Pas la peine de se bouger pour aller voir des connaissances, car c'est elles qui viennent à lui. Animées par la même passion, ils discuteraient des heures sur leur bécane favorite. Chez lui, dans ce taudis, il poursuit son entraînement, tenu de l'adolescence, en boxe thaï. Il se rappelle aussi des touches de piano, sur lesquelles il adorait glisser ses doigts. Ce n'est désormais plus possible et le virtuose qu'il était n'a malheureusement pas pu perdurer, les moyens manquant. Mais Kim n'aime pas vraiment sortir en groupe, sauf pour boire un verre ou jouer au Black Jack. Car c'est le week-end où il peut visiter sa fille, Jade, âgée de cinq ans, surveillée de près par son ex-femme et mère de sa fille. Parfois, elle disparaît, et les laisse seuls. Ainsi goûte t-il aux prémices du bonheur. Jusqu'à ce que leur route se sépare, et qu'il se laisse de nouveau plonger. Coupable.

MANIES :
—> Un trouble obsessionnel compulsif d'automutilation.
—> Dormir avec son canif sous l'oreiller.
—> Faire craquer ses doigts lorsqu'il réfléchit.
—> Décapsuler ses bières avec ses dents.
—> Frapper le premier qui l'agace.
—> Parce que vous en voulez encore, en plus ?

AIME :
—> La nourriture asiatique, en particulier la cuisine thaïlandaise, il ne pourrait pas manger quelque chose sans que ce soit épicé.
—> Les profiteroles au chocolat.
—> La nature. Être en contact avec elle, se sentir rassuré de sa simple présence. Devenir un tout alors qu'il n'est rien.
—> L'héroïne. Il s'en passe rarement depuis qu'il a été viré.
—> La solitude. Tant pour protéger autrui que pour tenter de trouver la paix. Une paix temporaire, évidemment.
—> Faire des virées en moto. Partir, avaler les kilomètres sans regarder derrière lui. Être embrassé par la brise violente et laisser l'adrénaline monter au fil des vitesses.
—> Les jeux-vidéos. Ne riez pas, c'est un vrai et très bon joueur. Il est incollable sur le sujet et n'en raterait pas une pour vous filer une raclée virtuelle.
—> La musique, tant à écouter que le piano qu'il joue (jouait ?) magnifiquement bien. Il a encore quelques vynils qu'il a pu récupérer - les autres ont été vendus.
—> Sa fille Jade. Et même son ex-femme Sarah, mais de ça, elle ne préfère même pas en entendre parler.

N'AIME PAS :
—> L'eau. Une phobie. Une danseuse affreusement laide et effrayante.
—> Être enfermé. Ceci lui rappelle trop la prison, la puanteur, la vermine.
—> Perdre les pédales, tout simplement. Rentrer dans ses phases de crises qu'il ne contrôle pas et dont il ignore tout. Le monstre est bien trop fort pour lui…
—> Le réglisse, les cerises, et lorsqu'il y a trop de chocolat dans un dessert. Il aime les bonnes choses mais sans trop en abuser.
—> Lui-même.

Un nouveau prétexte pour foutre la merde dans un monde déjà bien pourri. En gros, c'est un peu ça ce qu'il pense à ce sujet. Que dire d'autre ? Il ne fricote pas avec le surnaturel, il est même plutôt terre à terre malgré son côté artiste refoulé. Il trouve cela plutôt normal que chaque race puisse cohabiter, néanmoins, un gros problème se pose : le bétail, c'est eux. Sang synthétique ou pas, ils restent des têtes à faire rouler, ce qui inciterait Kim à croire plutôt aux chasseurs qu'en autre chose. Mais n'ayant jamais côtoyé à proprement parler une créature autre qu'humaine - tout du moins à sa connaissance - il ne peut pas véritablement se prononcer. Ce qui est sûr, c'est que le choc était là lors de la révélation il y a six ans de cela…enfin, surtout lorsqu'il était dans sa cellule, et il s'est alors demandé si son compagnon n'était pas l'un d'eux. De toute façon, il a finit seul. Pas très curieux non plus, Kim préfère laisser les choses comme elles sont et, si un jour il se retrouve face à l'une de ces bestioles, il en reparlera.

Kim est possédé par un esprit vengeur, quelque chose dont il n'avait pas réellement besoin disons-le ainsi. Cet esprit appartient à un tueur en série des années soixante-dix, il a d'ailleurs frappé plusieurs fois durant la Guerre Froide. Condamné à mort, il s'est suicidé deux jours avant son exécution.
Il possède également quelques tatouages, un sur le dos, un sur l'avant-bras, sur la nuque, avant-bras, main droite (æquitas). Des cicatrices affreuses parsèment son corps. Les découvrir ne lui fait rien, tant qu'on ne pose aucune question.

Dante Andrea Manchini est né un trois novembre à New-York. Il est le quatrième d'une famille de six enfants, grande fratrie qui aurait mieux fait de rester un vague souvenir. Un père tyrannique, fricotant avec la mafia italienne, dont il n'a que des souvenirs effroyables. Une mère qui ne le voyait pas, qui préférait s'occuper de ses filles, pour ne pas dire sa fille. Seule celle-là avait l'air noble, belle, présentable. Une vraie poupée. L'autre, il était beau aussi, pas comme Dante, ou les autres qui se prenaient des coups de ceintures. Une autre s'est barrée, et c'était tant mieux. Elle a disparut de leur vie et c'était mieux ainsi. Puis il y a celle qui pleurait dans ses bras, celle qui retenait ses cris dans le creux de son épaule, cette enfant sage qui n'avait fait de mal à personne. Il se souvient de son visage, à elle, et même de son surnom : Georgy. Lui aussi avait mal mais préférait s'occuper de ses blessures à elle plutôt que de panser les siennes. À l'école, il restait au fond de la classe, préférant le coin du radiateur. Il disparaissait une fois les cours terminés pour aller dans le parc qui bordait l'école, et parfois même, jusqu'au majestueux Central Park dont il raffolait tant. Mais il était surveillé comme un animal en captivité. Lorsqu'il retournait à l'école avec des blessures visibles, on se moquait. Alors il partait au quart de tour et balançait son poing dans le premier qui avait ri. Ce n'est qu'à ce moment là qu'il se sentait mieux, mais il disparaissait presque aussitôt pour pleurer dans un coin. Il se souvient de cette fillette, blonde, qui l'avait trouvé dans sa cachette. Ses grands yeux verts s'étaient posés sur lui, elle semblait bien trop belle pour exister réellement, lui-même ne l'avait jamais remarquée. Elle se présenta sous le prénom d'Emily, elle l'incita à jouer avec elle. La seule main qui lui avait été tendue était en réalité un pieux qu'il s'enfonçait dans le cœur avec une joie incommensurable : elle lui fit une mauvaise farce, le présenta à tout un groupe qui se mit à rire dès lors où elle dévoila ses secrets au grand jour. Âgé de treize ans, il les a retrouvés, eux-mêmes se trouvaient dans son établissement. Il se vengea. Son père ne lui laissa pas de répit et le punit.

Sans savoir que ça allait être sa dernière grosse raclée de sa vie. Un an plus tard, un bain de sang, une véritable boucherie, quelque chose qu'il vit de ses propres yeux et qui le choqua profondément. Il disparut dans la faune humaine et se terra deux mois dans les égouts de la ville, jusqu'à ce qu'il soit conduit vers un foyer pour jeunes. C'est là-bas qu'on lui assigna un nom, prénom, une nouvelle identité. Quelque chose s'était produit durant ces deux mois mais il ne sut quoi. Instabilité, peur, soumission, il ne se connaissait plus. Le traumatisme avait été tel qu'il accepta même ce prénom idiot, Kim, ainsi qu'un nom fraîchement inventé pour faire honneur à la foi de la présidente.

Quelle truie.

Elle ruminait sans cesse les mêmes choses, leur faisait avaler des salades protestantes au petit-déjeuner comme au souper. Vous n'imaginez même pas quel fut le bonheur de le savoir adopté. Un couple de sexagénaires, qui voulurent sans doute se rendre utiles. Malheureusement ils reçurent un adolescent qui n'avait pas réellement un état stable. Les efforts fournis se démultiplièrent en force, leur amour se voulait être sincère, et il l'était, sans aucun doute. Mais ils souffraient de voir Kim ainsi. Il était seul, il était maculé de blessures, qui, parfois, venaient de « nulle part ». Il avait déjà surprit Elisabeth pleurer, dans la cuisine, alors qu'elle ne coupait pas des oignons. Il fit quatre tentatives de suicide, toutes échouèrent de peu, le laissant à chaque fois un bon mois dans un lit d'hôpital sous perfusion et anxiolytiques forts. Les médecins semblaient désespérés, mais seul le psychiatre semblait bien vouloir garder son calme - en apparence, sans doute, le professionnalisme ne le tuera pas. Malgré tout, il décrocha son diplôme et fut encouragé à faire des études supérieures. Lui n'était pas si confiant que ça. Une fois de retour sur les bancs de l'université, il cessa le Droit la première année et fit une école de police, où il finit diplômé à l'âge de 22 ans.

Il quitta leur foyer, s'installa grâce à son premier salaire et un peu d'aide financière de leur part. Kim se trouva être un bon flic, étrange n'est-ce pas ? Mais il le fut. Il rencontra Sarah, ils se fiancèrent, eurent un enfant par accident, mais décidèrent de le garder malgré tout. Une belle petite fille qu'ils baptisèrent Jade, en hommage à la teinte de ses iris. Kim prenait soin de lui et faisait du sport régulièrement, chose qui était conseillée lorsque l'on était dans les forces fédérales. Il fut dans les stups pendant un long moment, c'est d'ailleurs par ce biais-là qu'il se rendit complètement accro à l'héroïne. Il gardait un peu de poudre à chaque perquisition, sous les yeux de son coéquipier et ami qui ne disait rien à ce sujet. Ceci n'aida pas l'homme à mieux se comporter vis à vis de sa femme. Il laissait sa gamine spectatrice. Une horreur. Mais ce n'est qu'aujourd'hui qu'il s'en est rendu finalement compte. Pourtant, il redoublait d'affection vis à vis de Jade. Elle l'adorait. L'admirait. Pire, elle le vénérait comme un héros.

Ce n'est que cinq ans après qu'il fut prit par d'autres membres de la brigade qui le dénoncèrent. Kim fut viré et il se retrouva au chômage. Exactement ce qu'il ne fallait pas. Car c'est durant cette période que ses changements brutaux de comportements furent les plus effrayants. En effet, il finit par se venger de ses anciens collègues, poussé par quelque chose qu'il ne connaissait pas et sur laquelle il n'avait pas la main mise. Résultat, deux morts. Kim fut trouvé, interrogé, condamné. Quinze ans pour homicide volontaire. Il fut incarcéré dans une prison en Louisiane, l'État dans lequel il avait tué et dans lequel il avait été jugé. Il resta six ans et quelques mois là-dedans. Un véritable enfer, qu'il fit subir également aux autres. Kim fut littéralement transformé et dû se battre comme un lion pour survivre. Rapidement et heureusement il fut respecté par l'ensemble de son étage. Sa cellule était vide par peur qu'il ne se donne la mort ou, pire encore, réussisse à blesser un gardien ou d'autres détenus. Le orange, autant le dire, ne lui allait pas. Mais qu'importe.

Grâce à un bon comportement, dixit, il sortit il y a sept mois. Jade et Sarah ne venaient plus le voir depuis longtemps à la prison, ce qui l'avait rendu affreusement triste. Le seul endroit où il put trouver un endroit où loger fut dans le quartier le plus mal famé de Shreveport, d'abord ce fut un taudis, puis ce devint une pièce à survivre. Lorsqu'un nouveau gérant fut à la tête du Sunco, il saisit sa chance et se proposa au poste de mécanicien. N'ayant pas la formation pour, mais la passion et l'aisance pour, il fut tout de même accepté.

La pluie brassait la ville avec agressivité, faisant toujours remonter le désastre qui avait englouti bon nombre d'hectares il y a quelques années de cela. Et tout cela à cause de qui ? À cause d'elle, bien sûr. Cette fichue eau, qui avait décidé de faire sa gourmande, quitte à bouffer les terres qui ne lui appartenaient même pas. La pluie, elle, était bien plus modeste. Elle pleurait sans faire chier personne, sauf les humains. Et les autres aussi…car oui, depuis, ils n'étaient plus tout à fait seuls. On avait rêvé d'extraterrestres verts, aux yeux globuleux et à l'intelligence fabuleuse. Tu parles. Tout ce qu'on avait gagné à la place, c'était vingt neurones en moins, des poils et des crocs. Lorsque, bien sûr, ce n'était pas un cadavre ambulant. L'Amérique, qui comptait beaucoup de fidèles de l'Église, s'est vue trembler comme jamais. Le porte-parole de la communauté vampirique parlait, tentant de calmer les émois de certains journalistes. Parfois même, ils devaient interviewer par caméra interposées, car le journaliste refusait d'avoir à faire directement à un suceur de sang, bref, un bouffeur d'humains. En fait, la seule chose qui l'avait empêché d'aller face à cette femme, c'était juste la peur de se pisser dessus. Plutôt compréhensible lorsqu'on a été bassiné par des films d'épouvante pendant des années et des années, rabâchant sans cesse que ce n'était que de la fiction. Le vent a tourné.

Assit aux portes du garage qui étaient grandes ouvertes, il fumait un joint en le pinçant fermement du coin de ses lèvres. La luminosité ambiante l'empêchait tout de même d'ouvrir totalement les yeux, et alors, il fronçait les sourcils de temps à autre, lorsque l'astre voulait s'imposer un peu plus encore.

« Y'a Wade qui veut sa Yamaha dans deux heures, qu'est-ce que tu glandes, Kim ? »

Les patrons. Toujours stressés. La pause avait duré le temps d'une bouffée d'herbe grillée et de quelques larmes versées par le ciel. C'était très rare qu'il se fasse demander ainsi, mais la pluie avait un effet, disons…hypnotique sur lui. Étrangement, il trouvait ça beau. C'était de la flotte, mais une belle flotte. Celle de la nature, une flotte timide et pourtant généreuse. Il ne l'avait pas contemplée avec une vue panoramique comme celle-ci depuis fort longtemps, car les barreaux avaient bouchés sa vue.

« Ouais, ouais, j'ai plus qu'un truc à finir et il pourra la prendre comme il veut, sa bécane, grommela t-il tout en gardant sa cigarette dans sa bouche. »

L'homme se leva, écrasa le reste de son joint après l'avoir finit en deux traites, puis retourna au travail. Pour une fois qu'ils devaient mettre l'électricité en plein jour, c'était quelque chose d'exclusif. Il attrapa un pot d'échappement neuf à mettre sur la Yamaha, puis commença à dévisser le tout. Le gérant, qui semblait s'ennuyer, ne tarda pas à prendre de nouveau la parole.

« Quel temps de chien…je me demande quand est-ce que ça va s'arrêter.
- Ça fait du bien aux champs, te plaint pas.
- Mais ça fait mal aux yeux.
- C'est toi qui le dit. »

Le pot d'échappement en place, il essaya le moteur, qui ronronna comme du velours. Ceci arracha un petit sourire à Kim, plutôt satisfait de ce qu'il avait fait de cette moto japonaise. Même si, soyons d'accord, il n'était pas pour ce clan yamaha-mitsubishi-et-tout-ce-qui-s'en-suit. Au contraire, les Davidson étaient bien meilleures question tenue de la route. Éternel débat entre motards. Et sujet de querelles, forcément…

« Il paraît que David a un pote vampire. T'y crois, à ça ?
- Au point où j'en suis…
- Moi, ça me ferait flipper. Ce genre de personnes foutent plus les boules qu'autre chose. Il croisa ses bras et leva le menton vers une ampoule défaillante. Une chance qu'ils ne viennent pas nous pomper de jour. Ma femme et moi, on a pas envie que nos deux filles finissent dans le pieu avec des vampires, si tu vois ce que je veux dire. Je sais pas ce qui leur plaît chez eux mais je ne leur permettrait pas de toucher à un seul cheveu de ma Betty, ni même de Jessica…sinon je…hé, tu m'écoutes ?
- Hmm… »

Il retira le contact. Kim jeta un coup d'œil au cadran de l'horloge, qui annonçait les six heures et demie passés. Pas encore le moment pour rentrer, mais malheureusement, il n'y avait plus rien d'autre à faire dans le garage, sauf si, évidemment, un client se pointait. Ce qui, avec une pluie pareille, ne risquait pas d'arriver de si tôt. Mais on pouvait toujours espérer qu'un vampire vienne d'ici une heure ou deux…ça changerait de la gueule cramée aux UVs de certains.

Il a trois familles. Une effacée, une oubliée, une détruite. Il y a les Manchini, les Parker, et puis les Godhammer. Il a perdu tout ce qu'il avait et s'en est sans doute mieux ainsi. Il n'a récolté ce qu'il a semé : tout est de sa faute. Pour lui, les Manchini ont été décimés. Seul le visage de Georgiana reste ancré dans son esprit au point de le tordre de douleur. Il a coupé les ponts avec les Parker depuis qu'il a été inculpé du meurtre de deux de ses anciens collègues - à juste titre. Il ne sait pas, ne sait plus. Sarah a caché depuis trop de temps ses ordonnances et feuilles de visites à l'hôpital à cause de lui. La seule qui semble encore l'aimer, c'est Jade. Mais ses yeux à elle lui font un mal fou.