✤ Traits de caractères A l’air taré. Aime agir en taré. D’accord, il est taré. XX N’a aucun tact. XX Parle et rit fort. XX A un humour très particulier. XX A un impressionnant sens de la répartie. XX Souriant – surtout depuis qu’il a des canines toutes neuves. D’ailleurs, il est inexplicablement craquant lorsqu’il sourit. XX Est généralement de bonne humeur et ne la perd pas facilement. XX Adore taquiner. Tout le monde y passe, et ses victimes favorites sont les personnes trop susceptibles à son goût. XX Étonnamment  sensible, compatissant et à l’écoute d’autrui. XX Grand romantique. XX Véritable boule d’énergie, boute-en-train, dynamique. Bref, on dirait qu’il est hyperactif. On se demande si les gens dont il se nourrit ont du Redbull dans les veines. XX Charmeur, aime bien flirter. XX Adore attirer l’attention. XX Un poil imbu de lui-même. XX Arrogant sur les bords. XX Protecteur et  possessif, surtout envers les gens qu’il aime. XX Bon vivant mort-vivant, il ne crache pas sur une occasion de s’éclater. XX A l’air irresponsable, mais globalement, il gère bien sa nouvelle vie.  XX Sait garder son calme lors des situations de crise. XX Rancunier. Si on le fait chier, il va s’en rappeler longtemps - assez longtemps pour que vous teniez à ce qu'il vous oublie une fois qu'il aura atteint un âge où il pourra aisément botter des culs. XX A tendance à cogner avant de poser les questions. XX Impulsif, prend ses décisions sur un coup de tête. XX Peut être insupportable quand il le veut. XX Teste presque constamment les limites des autres, peut devenir agaçant et exaspérant. XX Est patient, mais avec lui, mieux vaut ne pas pousser le bouchon trop loin.

✤ Occupation nocturne Serveur principal du Croquemitaine, Callisto passe le clair de ses nuits à y travailler. Les clients l’apprécient et il aime bien son boulot, bien que ce ne soit qu’une solution temporaire. Le nouveau-né s’accroche toujours à son humanité et reste, d’une certaine manière, proche des humains. C’est pourquoi il fait de l’alternative modelling à temps perdu et tient un compte Instagram et un compte Vine où il a pas mal de followers grâce à sa belle gueule. Ça peut avoir l’air idiot aux yeux de ses aînés, mais il tient tout de même à faire partie du monde qui était autrefois le sien. Peu lui importe que ce soit d’une manière aussi superficielle. Il s’amuse, sort dans les bars, rencontre de nouvelles têtes et souvent, il aime à se faire passer pour un humain.
Cal, c’est également un amoureux de la musique, un collectionneur de comic books, un dévoreur de films et un gamer invétéré.  Il flambe son pognon aussitôt qu’une nouvelle console ou un nouveau jeu sort, s’arrange toujours pour assister à la première du dernier film de Marvel ou de DC et, lorsqu’un qu’un groupe qu’il aime se donne en concert dans les environs, on peut être sûr de l’y voir. Mais ce qu’il aime par-dessus tout, c’est les sensations que lui procure le sport de combat – véritable passion depuis son enfance. Le seul hic, c’est de trouver des gens avec qui le pratiquer, parce que vu sa force, il risque d’arracher un bras à un humain par mégarde. Ou de le tuer. C’est des choses qui arrivent, quoi.

✤ Discipline Puissance niveau deux. Ce pouvoir rend Callisto physiquement plus fort que le reste des vampires. Il a toutefois conscience de ne pas être le plus balèze, n’ayant que douze petites années vampiriques. Bien sûr, il possède une bonne carrure de jolis muscles, mais ce qui le différencie vraiment, c’est son talent non négligeable en sports de combat. Pratiquant depuis ses six ans, il a tout bêtement commencé par des cours de taekwondo, puis s’est intéressé à la boxe vers l’adolescence pour finir par pratiquer le krav-maga à dix-huit ans. Les buveurs de sang sont bien entendu naturellement dotés d’une puissance inhumaine, mais ils ne savent pas tous se battre comme notre bel italien : voilà un bon point pour lui. Il est donc spécialisé dans le combat rapproché à mains nues, paré pour neutraliser des assaillants armés ou non et, dans les cas extrêmes, les tuer. Le fait qu’il puisse soulever des charges improbables et péter un bras en quatre comme si ce n’était qu’une brindille n’est qu’un bonus, non? D’accord, il a parfois encore du mal à connaître les limites de sa force. Ce n’est pas comme s’il foutait une raclée à des passants au hasard pour tester ses pouvoirs.
«Alors si je fais ça, je lui éclate le visage. Intéressant.»
C'est un peu con, mais à part ses muscles et sa belle gueule, Cal n'a pas grand-chose de plus en tant que vampire. Ses capacités d'hypnose sont dans la moyenne, clairement pas extraordinaires. Après, c'est peut-être parce qu'il évite de s'en servir, la plupart du temps. Avec de la pratique, ça devrait venir. Par contre, côté télépathie, il est un peu nul. Bien sûr, il peut ressentir une impression, mais on est très loin de la perception claire des pensées. Encore là, ça peut parfois être difficile pour lui de se concentrer. En gros, Callisto, il est un peu comme un vieux Nokia: bonne chance pour le mettre HS, mais il a du mal à capter les réseaux.
Étonnement, il n'est pas particulièrement difficile à surveiller pour un nouveau-né. L'Italien possède un très bon self-control et a conscience d'être encore instable, donc il ne rechigne pas à se nourrir de sang humain aussi souvent qu'il en a besoin, question de mettre toutes les chances de son côté. Certes, il s'amuse à sa façon, mais il tient surtout à ne pas trop faire de vagues pour qu'on lui fiche la paix.

✤ Convictions Son avis sur le sujet est un peu ambigu. Évidemment, Callisto trouve le fait de pouvoir continuer à avoir une vie plus ou moins normale malgré son vampirisme absolument génial. Il a un boulot sympa et peut continuer à faire à peu près tout ce qu’il aime, alors pourquoi s’en plaindre? Cal tient à sa liberté et à une partie de son humanité, et se cacher du monde est la dernière chose qu’il aurait envie de faire. Il a toutefois beaucoup de mal avec tous les conflits et les problèmes que la révélation a créé et se demande parfois s’ils auraient mieux fait de rester tapis dans l’ombre. Ayant été élevé pendant onze ans par sa sire qui, elle, est de la veille école, il peut comprendre le point de vue de certains vampires désapprouvant fortement leur nouveau statut, bien qu’il ne soit pas d’accord sur toute la ligne.  

✤ Signes particuliers Cal a plusieurs tatouages. En fait, à ce point-là, ce mec est presque une fresque. On y compte une manche sur le bras gauche, un chest piece montant jusqu'à son cou et, I shit you not, un autre juste au-dessus de son pubis. Côté piercings. il affiche un bridge, un snakebite, un anneau au nez et des écarteurs.

Mon père me foudroie du regard. Ma mère fait comme son adorable fils avait été avalé tout rond par Satan en personne. Le directeur, lui, fait comme d’habitude et agit en gros lard suffisant. Je sais que la situation est sensée être grave et que je devrais me sentir con, mais j’ai du mal à me retenir de rire pour la simple et bonne raison qu’il est inscrit «D.P.» sur la plaque mise bien en évidence devant son bureau. Je sais parfaitement que ça signifie «délégué du personnel» ou une merde du même genre, mais est-ce qu’il sait que ça peut vouloir dire double pénétration?

-Il nous avait pourtant juré qu’il ne s’en servirait qu’en absolue nécessité. Pas vrai, Callisto?

Et voilà le paternel qui me lance le regard assassin de la mort qui tue. Je considère que j’ai eu raison de remodeler le visage de cette enflure avec mes poings, et donc que c’était un cas d’absolue nécessité. Bon, j’avoue que je n’ai peut-être pas eu l’intention de l’envoyer passer un séjour à l’hosto, mais quand même. Il va s’en rappeler longtemps.

-Je savais que nous n’aurions pas dû lui payer ces cours de boxe, que maman lâche. Ça le rend violent.

Rah, mais putain! C’est pas mes cours de boxe qui me rendent violent, mais ces ordures qui ne veulent rien entendre. Je me renfrogne. Y’avait ce con qui harcelait Mirella et qui ne voulait rien entendre, alors je lui ai fait comprendre qu’il a intérêt à lui foutre la paix. On touche pas à cette fille, un point c’est tout.

-Ce connard a traité Mirella de salope simplement parce qu’elle n’a pas voulu de lui. Il la lâchait pas. C’est quoi cette connerie d’école qui permet aux mecs de harceler les filles, hein?

-Callisto, surveille ton langage!

Je sais, je sais. Ce n’est pas comme ça que tu m’as élevé, t’es déçue de moi, t’as peur que je finisse comme mon frère et tu croyais pourtant être une bonne mère. Je connais la chanson.
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C’est avec fébrilité que j’ouvre cette lettre que j’attendais depuis si longtemps. Comme on dit, ça passe ou ça casse. Le test physique n’a pas été un problème pour moi, mais je me suis fendu le cul à rattraper ma longue lignée de notes toutes plus horribles les unes que les autres afin de pouvoir atteindre mon objectif. Derrière moi, ma mère m’observe et a l’air dix fois plus nerveuse que moi. Je déplie la feuille de papier. Putain faites que je l’aie, faites que mes efforts aient porté leurs foutus fruits.

«Vous êtes donc accepté dans le programme de technique policière pour l’année 2001-2002.»

Accepté. Accepté, bordel de merde. Je me retourne vers maman et lui tend la preuve que son petit dernier ira à l’université, le sourire fendu jusqu’aux fenêtres. Je sais qu’elle avait perdu espoir depuis belle lurette. Vu le parcours pas très rose de Gabriele et mes nombreuses conneries, je ne peux pas lui en vouloir d’avoir cessé d’y croire. Ses yeux qui pétillent de la fierté qu’elle ressent  envers moi vaut tout l’or du monde. C’est moi où je vois des larmes, là? Oh putain, non. Pas besoin de pleurer. Je soupire et la prends dans mes bras.

-Je suis tellement fière de toi, mon beau Callisto.

Sa voix se brise lorsqu’elle prononce mon prénom. Faut compter sur ma mère pour rendre toute situation intense en émotions. C’est pas de sa faute, c’est une femme sensible. Elle déborde tellement d’amour qu’elle ne sait même plus où le mettre. Elle avait peur pour moi, voilà tout.

-Je te l’avais dit que tout allait s’arranger. Tu vois? J’avais raison.

Je l’éloigne légèrement de moi. Dire «j’avais raison» à l’un de tes parents est un achievement en soit.

-Tu attendais de pouvoir dire ça, hein?

Son ton se veut sévère, mais le sourire bienveillant qu’elle m’adresse ne me dupe pas. Faut pas déconner. Maman me connaît beaucoup plus que ce que j’aimerais admettre.  J’éclate de rire. C’est le stress qui disparait comme par magie. C’est l’angoisse de ne pas savoir si j’allais faire quelque chose de bien de cette vie à la con qui cesse de m’écraser. Tout va bien aller.

-Ouais, je l’avoue. Mais j’avais quand même raison.

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Je la détaille de la tête aux pieds en m’efforçant de conserver une expression impassible. Je peux pas m’en empêcher : je trouve ça marrant qu’une gosse s’essaie à entrer dans ce bar. C’est ça, tu peux bien me regarder comme si j’étais une merde. C’est mon boulot, chérie, et si t’as pas tes cartes pour prouver que t’as l’âge de te défoncer la gueule, c’est pas mon putain de problème. J’en croise à tous les soirs, des petits cons comme toi, et bien que je dois admettre que t’as de la gueule et de l’assurance, c’est pas ça qui va te laisser passer.

-Tes cartes d’identité, que je répète pour la deuxième fois.

Je croise les bras et jette un coup d’œil à la file de potentiels clients qui attendent d’entrer. J’espère que cette gonzesse ne fera pas sa tête de mule. J’ai vraiment pas envie de devoir contenir des enflures sans aucune patience.

-À mon âge, on n’a plus besoin de cartes mon beau.

Oh sa mère la pute. Ça se prend pas pour de la merde, ce p’tit bout de femme. Je soupire, irrité par son arrogance.

-Écoute, t’as pas soixante-dix ans à ce que je sache. Quand ton âge sera écrit sur ton front, tu pourras entrer sans preuves. Là, je te prierais de dégager. Y’a des gens qui attendent.

Sérieux, j’aime bien ce petit boulot, mais j’ai parfois hâte de terminer l’université. Mon futur métier ne m’évitera pas de croiser des imbéciles, loin de là, mais disons que ça va changer de mon travail de videur et de portier. Je vois son regard s’attarder sur ma poitrine et ses lèvres s’étirent d’un sourire absolument méprisable. Je sais pas pourquoi, mais j’aurais vraiment envie de la tirer par les cheveux jusque dans le parking. Son attitude m’horripile.

-Je voulais simplement m’amuser pour une fois, mais c’est bon. Je pars… Callisto.

Fichu nametag. Je l’arrache de ma chemise d’un geste vif et le fout dans ma poche. J’ai sérieusement pas envie que des gens chelous connaissent mon prénom, mais ça fait partie l’uniforme. Pour ce soir, je vais faire comme si ce bout de plastique n’avait jamais existé. Je la suis du regard alors qu’elle s’éloigne tranquillement. Je suis juste heureux qu’elle soit partie sans faire d’histoire parce qu’honnêtement, elle me fout un peu les boules. Comme quoi, il faut toutes sortes de personnes dans ce monde de fous.

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-Allez, tu peux partir, je m’occupe du reste. Y’a ta copine qui t’attend encore, hein? En plus, t’as cette remise des diplômes demain.

Je ne peux m’empêcher de rire lorsque Valerio me lance un clin d’œil franchement pas subtil. Il est toujours comme ça, ce gars. Presque aussi taré que moi. Pour une fois, je n’insisterai pas. S’il veut que je fiche le camp, je vais le faire avec joie. La soirée au bar a été longue, et si je peux arriver à l’appart’ une heure à l’avance, ça me ferait vachement plaisir.

-C’est clairement pas moi qui vais te contredire. Merci, mec!

-La prochaine fois que tu remets les pieds ici, c’est en tant que policier. On t’a déjà dit que t’as pas une gueule de flic, Callisto?

Ouais, ouais. On me le dit souvent. Il parait qu’avec mes piercings et mes tatouages, j’ai plus une gueule de petit merdeux. Ça change pas qu’à partir de demain, j’aurai le diplôme et que ce petit merdeux sera éventuellement agent. À notre époque, vingt-quatre ans, c’est un bon âge pour commencer sa carrière. J’ai encore toute la vie devant moi.

-Je vous souhaite pas de devoir me voir débarquer ici en tant que policier. On sait jamais, je pourrais faire de l’abus de pouvoir.

Le tout dit avec mon plus beau sourire sarcastique.

-C’est ça, c’est ça. Déguerpis!

Je ne me le ferai pas dire deux fois. Je franchis la porte et me dirige vers ma voiture, le sourire aux lèvres.  En m’approchant, je remarque assez rapidement une silhouette féminine semblant attendre près du véhicule. Mon sourire s’élargit. Parfois, Mirella vient me rejoindre après le boulot. Je n’aime pas tellement qu’elle sorte aussi tard, mais ça me fait toujours chaud au cœur, donc je ferme ma grande gueule. Cependant, une fois plus près, je me rends bien compte que celle qui m’attend n’est pas du tout ma petite amie. Je m’arrête, surpris, puis croise les bras. C’est que je la reconnais, cette petite effrontée! C’est la fille qui a tenté d’entrer au bar sans preuve d’identité, il y a deux semaines. Qu’est-ce qu’elle fout là? Comment pouvait-elle savoir que cette bagnole-là était la mienne et pas celle de quelqu’un d’autre? Elle me regarde sans rien dire. Je décide de m’avancer et de l’aborder.

-Hey, c’est pas toi la fille que j’ai refusé à l’entrée l’autre fois? J’peux t’aider?

L’inconnue penche la tête et sourit. Tant mieux si elle s’amuse, mais honnêtement, je la trouve fucking creepy. J’en viens à comprendre ces femmes qui ont peur de sortir seules, la nuit. C’est pas que j’ai pas les capacités pour contenir une gonzesse un peu chelou, mais j’aimerais ne pas avoir à la mettre à terre juste parce que je n’aime pas qu’on s’adosse à ma voiture à trois heures du mat’. Ça serait moi, le putain de creep.

-J’avais seulement envie de faire ta connaissance, Callisto.

Cool. Cool, cool, cool. Elle se rappelle de mon prénom, en plus. Quasiment pas maniaque, la nana. Curieusement, j’ai pas trop envie de faire sa connaissance. On se demandera pas pourquoi. Je franchis la courte distance qui me séparait d’elle et la regarde droit dans les yeux. Franchement, elle est pas mal et dans un autre monde, si je n’avais pas été en couple et si elle n’avait pas agi en stalkeuse folle, peut-être aurais-je eu envie de faire sa connaissance. Je dis bien peut-être.

-Écoute, j’te connais pas, tu me connais pas et j’ai une petite amie, ok? J’suis crevé, je rentre chez moi.

Elle est peut-être juste bourrée. Elle m’a trouvé de son goût et s’est rappelé de moi avec un verre de trop dans le nez, voilà tout. Son regard d’ambre se fait franc et, après quelques secondes, je me rends compte que je me sens incapable de détourner les yeux. C’est la fatigue? C’est… quoi?

-Tu es vraiment mignon. Nous allons finir par nous connaître, ne t’en fais pas bel enfant.

Je devrais partir. Je devrais la repousser, lui faire une clé de bras et la foutre par terre, je sais pas. Tout ce que je sais, c’est que lorsqu’elle pose ses mains sur mes épaules, son regard toujours planté dans le mien, et me dis de déverrouiller la voiture, j’ai enfin la certitude que j’ai devant moi un véritable cauchemar déguisé être humain.

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C’est toujours comme ça. Quand, après mon réveil, j’ai fini de me nourrir, Beatrice vient me voir. Ça ne dure que depuis un mois et j’ai déjà l’impression que ça fait une éternité que je suis enfermé. Ironiquement, je n’ai encore aucune idée de ce qu’est vraiment l’éternité. Ça viendra peut-être, mais en ce moment, c’est la dernière chose que j’aurais souhaitée. Elle me garde là, dans ses souterrains louches, et me donne des humains à vider comme si j’étais un foutu oisillon. Honnêtement, c’est ce que j’ai l’impression d’être. Incapable de me contrôler, perdu dans un monde où je n’ai aucune notion de la réalité. Oh, c’est ce qu’elle essaie de m’expliquer. À chaque nuit, ma sire – il paraîtrait que c’est le mot utilisé pour désigner son créateur – s’assoit à mes côtés et me parle. Si vous voulez mon avis, j’ai plutôt l’impression de devenir fou. Je dois être dans un hôpital psychiatrique à me baver dessus comme un putain de légume pendant que j’imagine ces conneries.

-Tu sais, Callisto, j’avais un fils, autrefois. Il est mort à peu près à ton âge.

Cool shit. Pourquoi tu me dis ça là? Tu veux que je compatisse? Tu veux que je te demande comment il a cassé sa pipe? Je n’en ai rien à chier. Tu me fends le cul, espèce de salope. C’est sur un caprice que t’as foutu ma vie en l’air. Tu peux pas tout enlever à quelqu’un et t’attendre à de la compassion, merde! Je ferme les yeux, puis prends une grande inspiration. Tourne ta langue sept fois dans ta bouche avant de parler, Cal, parce qu’insulter une vampire vieille d’à peu près sept-cents ans n’est pas une bonne idée. Tu  le sais. Tu y as goûté.

-Ah ouais? Et il a crevé comment, si c’est pas indiscret?

Beatrice m’offre un sourire indulgent, le genre qu’on fait à un gosse de cinq ans qui dit «pipi-caca». Sérieux, meuf, j’ai pas besoin que tu me donnes l’impression d’être mentalement retardé. Ok, j’suis pas plusieurs fois centenaire, mais j’suis pas non plus trisomique.

-On l’a brûlé pendant l’Inferno en sachant qu’il était mon enfant. J’ai pu échapper aux flammes.

Elle tente de passer ses doigts dans mes cheveux, mais je me dégage d’un geste vif. La vampire me foudroie du regard avant de continuer à parler.

-Tu as presque le même visage que lui, qu’elle lance d’une voix rêveuse.

Oh fuck. D’accord. Je comprends. Je comprends, et elle est complètement démente. C’est pas moi qui suis fou, c’est elle. C’est elle, putain. Ce vieux débris fait un mommy complex. On aura tout vu. Je fronce les sourcils et recule presque imperceptiblement.

-Alors c’est ça? T’as pas fait ton deuil après quoi, six-cents ans? T’as conscience que j’suis vraiment pas ton fils, non?

Sur le moment, c’est le plus haut niveau de politesse que je peux atteindre. C’est apparemment pas suffisant, parce que ma sire a un claquement de langue irrité, et je prie qu’elle ne puisse pas me tuer avec ses yeux. Ben quoi? On sait jamais. Elle retrouve toutefois assez rapidement son expression paisible et doucereuse.

-Bien sûr que tu l’es. Je suis celle qui t’a donné ta nouvelle vie, Callisto, et je te conseille de ne pas l’oublier. Je te garde à l’abri, je te nourris et t’éduque. Démontre un tant soit peu de gratitude.

Je n’ai jamais demandé ça. T’étais qu’une chieuse qui voulait entrer dans le bar où je bossais. Si je t’avais laissée faire, t’aurais attaqué un autre mec dans la vingtaine, c’est ça? Espèce de folle furieuse. T’as jamais entendu parler de deuil? C’est pas lassant de ruminer la mort de quelqu’un pendant plusieurs siècles? Plus le temps passe, et plus je me dis que c’est le reste de leur humanité qui rend les vieux vampires monstrueux. Ils sont là à ressasser leurs peines et leurs rancunes jusqu’à ce que ça les dévore. Elle recherche son enfant chez un pur inconnu. C’en est presque triste.

-Pourquoi moi?

-Tu avais un petit quelque chose de plus que les autres, j’imagine.

Attends, les autres? Parce qu’il y en a eu d’autres? T’as détruit la vie de d’autres hommes avant moi? Et ils sont devenus quoi, hein? Tu les as tués lorsque tu t’es rendue compte qu’ils n’étaient pas assez comme ton connard de fils? Cinglée. Cin-glée. T’es cinglée.

-Parce qu’il y a eu d’autres avant moi?

Elle a ce petit sourire de crapule qui me donne toujours envie de gerber.

-Quelques-uns, oui. Certains n’ont pas survécu. D’autres se sont enfuit.

T’as conscience que c’est pas en m’enfermant dans une cage dorée que je vais t’aimer? Tu comprends que je te hais, hein? Que je t’en voudrai pendant très longtemps de m’avoir tout pris? J’avais une mère, un père, un frère, des amis et une copine, bordel de merde. J’avais une carrière devant moi. Tuer des hommes qui ressemblent à ton fils jusqu’à ce que tu le retrouves – ce qui n’arrivera jamais – fait de toi une psychopathe serial killer.

-Tu vas t’y faire, mon enfant. J’aurais pu faire de toi mon marqué, mais on avait tué mon nouveau fils, ce n’est pas que mon esprit qui serait mort. Je dois te garder pour moi, comprends-tu?

En fait, tu viens d’avouer que t’es folle à lier. Je n’ai pas le choix, hein? Je dois rester emprisonné avec toi. Je sens un vide immense ainsi qu’une froide résignation m’envahir.

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Je regarde le billet d’avion que Daria me tend, puis son visage. Encore le billet. Et son visage. D’accord, j’ai l’air un peu retardé, mais j’ai du mal à croire ce qu’elle est en train de faire. J’veux dire, c’est quand même sa marquée.

-Tu l’as pas pris à midi, ce vol, hein? J’crois pas qu’ils soient habitués que leurs sièges soient salis par de la cendre.

Ouais, c’est tout ce que je trouve à dire. Absolument brillant. Mais l’inquiétude que je peux lire dans son regard me met sur mes gardes. Résultat? Les conneries sortent toutes seules de ma bouche. J’ai peur que, même temporairement – et exceptionnellement – hors de l’Italie, Beatrice finisse par l’apprendre bien vite. Je lui tire quand même un léger sourire.

-Bien sûr que non, idiot. Par contre, lorsque tu arriveras aux États-Unis, tu devras te dépêcher de trouver un refuge avant que le jour se lève. Et vite. J’ai un contact sûr à Shreveport. C’est là que tu iras.

Je fronce les sourcils. Pourquoi là?  Pourquoi pas dans encore dix ans? Ma non-vie est en danger et je n’étais même pas au courant? C’est clairement pas que m’échapper des griffes de ma sire me contrarie, loin de là, mais j’ai l’impression que quelque chose m’a échappé.

-Wow, attends. De quoi tu parles, là? À Shreveport? C’est quoi ces conneries? Je sais
même pas c’est où. En onze ans, je suis presque jamais sorti de cet antre de merde. J’ai rien contre le fait que t’essaies de me sortir de là, hein, mais pourquoi?

Parce que t’es la seule à me trouver marrant ici? Parce que t’es la seule humaine parmi cette poignée de vampires tocards et que t’as de la sympathie?

-Je n’ai pas envie de te voir mourir le jour où elle va se rendre compte que tu ne seras jamais vraiment comme son fils. Je n’ai rien pu faire pour les autres. C’est notre chance. Elle ne sort du pays que lorsque le conseil la demande, et elle a trop peur qu’on te tue pour t’emmener avec elle. Alors je vais parler comme toi : arrête de dire des conneries et bouge ton cul.

Je prends le billet qu’elle me tend. C’est bon. Je vais bouger mon cul. J’ai pas envie de crever une deuxième fois. Je vais espérer que Beatrice reste une putain de froussarde asociale pour le reste de sa vie et qu’elle n’ait jamais la merveilleuse idée de me traquer jusqu’aux States. Quand t’as l’éternité pour réfléchir, tu sais jamais ce qui peut arriver.

-Tu sais que tu vas en chier hein? Elle peut pas te tuer, mais elle va quand même te le faire regretter.

Elle hoche tout simplement la tête, résignée. Après tout, ça va faire deux-cents ans qu’elle est enchaînée à cette folle. Elle sait dans quel pétrin elle met les pieds.