✤ Traits de caractères
Le premier qualificatif pouvant lui être attribué doit être : peureuse. Et chez elle la peur entraîne bien souvent la lâcheté et une propension assez remarquable à la fuite quand il le faut. Yulia n'est pas celle qui montera au champ de bataille pour défendre sa vie ou ses opinions, ni même son clan. Elle vit dans la peur constante. Elle a peur de tout : des autres vampires, des autres créatures, du monde extérieure, de son ombre.... Au final, elle a développé une série impressionnante de phobies, certaines compréhensibles comme celle du feu ou du soleil, d'autres totalement stupides vu sa race comme l'agoraphobie, à tel point d'être malade quand elle doit sortir de chez elle et de devoir se préparer mentalement à affronter le monde extérieure. Dominée par ses craintes et ses phobies, elle est de nature solitaire. Cela n'est guère un problème. La jeune vampire passe son temps enfermée dans son musée, devenue sa maison au milieu de ses livres anciens ou neufs, de ses œuvres d'art. Elle n'a guère besoin de compagnie, ni de celle des siens ou des humains. De toute manière, les autres l'effrayent.
Ajoutons à cela que son habitude de vivre enfermée en font une timide maladive, qui arrive à rougir quand il y a plus de 5 personnes dans la même pièce qu'elle et qu'elle doit prendre la parole. C'est sans doute la vampire la plus effacée que vous trouverez en ville. Et pourtant, elle n'est pas sotte loin de là. Elle possède une fabuleuse mémoire comme tous les siens, mais elle l'a développée au maximum, engrangeant dans son esprit tout ce qu'elle lit ou peut trouver. Yulia a une immense soif de savoir et d’admiration pour l'art. Tout l'intéresse et elle veut tout savoir dans tous les domaines. Cette soif de savoir et son niveau de connaissances lui ont au final fourni sa seule arme et utilité. Elle est un vrai rat de bibliothèque et elle l'assume parfaitement.
De plus, Yulia est chaste de nature. Elle n'a jamais cédé aux avances de quiconque, plus par peur des autres que par conviction. Mais elle n'éprouve vraiment aucune envie à ce niveau-la, il faut dire qu'il est relativement difficile de séduire quand on ne sort pas vraiment de chez soi et qu'on est maladivement timide. Elle est aussi relativement énervante pour les autres. De nature naïve, cacher son savoir immense ou calculer l'impacte de ses dire ne fait guère partie de ses habitude. Yulia dit ce qu'elle pense et sait, donnant l'impression d'être arrogante et trop sure d'elle. Totalement naïve et faible, tant physiquement que de caractère, elle se soumet au plus fort et vend littéralement ses connaissances contre une protection. C'est pour cela qu'elle est conseiller du Maître : parce qu'elle sait beaucoup de chose utiles, et en contre partie il veille sur elle et la protège.
Faible et lâche, Yulia a toujours fui les combat et altercations, ne donnant de réelle valeur qu'à ses livres et œuvres d'art et sa petite misérable vie. Elle ne se bat pas, elle préfère largement la retraite stratégique, n'hésitant pas à abandonner son clan si besoin est. Et étrangement à ce niveau-la, elle n'a guère de remords. Elle frôle l'insensibilité totale quand il s'agit de la vie des autres et son asociabilité naturelle l'aide à ne pas se formaliser plus que cela de l'impacte de sa fuite. Peu importe que tous meurent, si elle peut sauver sa précieuse collection. Au fond, elle est très matérialiste.
D'un autre coté, elle est une vraie poupée de porcelaine, très belle et fragile, sans vraiment se donner la peine d'essayer de l'être. Yulia a de l'humour, pas toujours facilement compréhensible, mais elle peut être en tête-à-tête de conversation agréable, si on passe outre le fait qu'elle parle sans réfléchir. Souriante à souhait, elle renvoie une image de douceur qui n'est pas vraiment feinte. Ceci dit le sourire peut vite disparaître derrière une expression horrifiée si vous entrez dans son espace vitale.
En clair, Yulia n'a rien d'une vampire telle qu'on l'imagine, associable et maladivement peureuse, lâche, faible et naïve, c'est un rat de bibliothèque qui fuira sans vous aider si il y a un danger. C'est aussi avant tout quelqu'un d'irritant à force de tout savoir sur tout.

✤ Occupation nocturne
Conservatrice de musée, voilà le job idéale pour Yulia et elle l'a trouvé. Elle peut ainsi passer ses nuits au milieu des seules choses qu'elle aime réellement : ses œuvres d'art et ses bouquins poussiéreux. Elle peut aussi assouvir sa soif de savoir à sa guise. Et une des rares motivation à la faire sortir de son refuge reste le chinage. Mademoiselle adore par dessus tout trouver de nouveaux objets d'art ou antiques. Elle vend et achète à loisir, chine dans d'autres magasins ou mieux elle prend directement contact avec les vendeurs.
Autre occupation qui la force à sortir et qui lui prend du temps reste son rôle au Conseil des vampires. En tant que conseiller, elle se doit de participer aux réunions et parfois elle effectue des recherche pour le Conseil. Yulia est une pure intellectuelle, capable de balancer sons avoir mais elle n'a rien d’une femme de terrain combative. Sa place au Conseil, elle le doit à sons avoir, tout comme cela lui a valu sa place de bibliothécaire auprès du Conseil de Paris. Elle est celle qui sait et qui peut accessoirement donner une informations très précise et détaillée. Ceci dit elle répond plus aisément à une question lors d'un tête-à-tête qu'autour de la table du Conseil.
Autre petit détail, Yulia ne dort pas ou presque durant la journée. N'ayant guère ce besoin de se reposer avant une heure tardive du jour et s'éveillant relativement tôt pour un vampire, elle a toujours occupé ce temps précieux à son activité principale : la lecture. Elle dévore et mémorise tout, trouvant un intérêt à des textes anciens écrits dans des langues mortes depuis des millénaires. Tout l'intéresse au niveau théorique : histoire, culture, religion, art, sciences, romans, art de la guerre... Elle mémorise tout et poursuit comme but de tout savoir sur tout, d'avoir ce qu'on appelle la science infuse.

✤ Manies, habitudes & goûts
Yulia n'aime en soit pas énormément de chose : ses vieux livres et ses œuvres d'art sont ce qu'elle a de plus précieux. Vous désirez l'achetez ou avoir recours à ses services ? Proposez lui un bouquin tout poussiéreux écrit dans une langue mortes ou un tableau aussi vieux qu'elle. Elle aime néanmoins aussi certaines choses plus communes comme son téléphone portable, quelques bijoux, le confort. Elle a une admiration étrange pour les miroir au point de les collectionner surtout s'ils sont anciens. De manière assez surprenante, elle aime les fête et les bals, un reste de sa vie à Moscou auprès de Vassily durant de nombreuse décennies. Elle aime les joutes verbales bien piquées et les bonnes conversations intellectuelles.
Yulia n'apprécie pas tellement le contact physique, elle est du genre à se désinfecter les mains auprès avoir du serrer celle de quelqu'un, surtout depuis qu'elle a appris l'existence des microbes et autres organisme microscopiques. Elle fuit la compagnie si ce n'est en dehors d'une fête où elle peut passer inaperçue. Elle a de nombreuses phobies et tics étranges pour les autres. Incapable de séduire, elle bloque littéralement et panique quand quelqu'un tente de la draguer. Elle n'est pas trop coquette, mais met volontiers du rose sur ses lèvres, du noir au-dessus des yeux et peint ses ongles en diverses couleur.

✤ Discipline
Yulia n'a jamais développé ses dons vampiriques. Son pouvoir le plus remarquable reste sa mémoire extraordinaire. En général les vampires ont une excellente mémoire, mais elle elle n'oublie rien vu qu'elle a développé à son paroxysme cette capacité. Elle est une bibliothèque vivante, assoiffée de savoir et capable de vous citer un passage d'un vieux parchemin et de vous en donnez les références sans réfléchir. C'est au fond son seul vrai pouvoir et ce qui lui a jusqu'à présent toujours sauver la vie et valu la protection des puissants.
Parmi les dons des vampires, elle a développé un peu plus l'hypnose. C'est ainsi qu'elle a convaincu les serviteurs humains de son Sire de la fournir en livres et depuis ce temps, elle l'utilise quand elle souhaite quelque chose. Cela marche sur les humains, pour peu qu'il n'aient pas un trop fort caractère. Elle a bien sur des sens sur-développés, qui lui permettent de tout capter et de fuir quand il le faut. De plus, elle est rapide et vu son peu de force physique, cela est bienvenue. Yulia est l'antithèse du vampire tel qu'on le connaît. Dépourvue de force physique réelle, elle est restée un faible femme. Honteusement, elle doit avouer qu'un marqué peut aisément la blesser et l'envoyer au tapis et que les humains lui échappent. Elle est incapable de chasser, pas faute d'avoir essayé et d'avoir échoué tout aussi souvent.
Le don obscure qui lui fut fait est celui de la Chimérie. Yulia n'ayant jamais utilisé ses dons de vampires n'a jamais dépassé le niveau 1. Elle maîtrise plutôt bien ignis fatuus ou les images statistiques (elle utilise de préférence les illusions qui peuvent la masquer plutôt que d'abuser un autre sens moins pratiques),  qui au fond lui permet au mieux de fuir au galop. Elle n'a guère honte de sa faiblesse et de sa couardise, elle estime que le savoir est plus fort que le physique, même si cela ne la sauvera guère face à un chasseur, un métamorphe ou un autre vampire.

✤ Convictions
La Révélation est en soit dans la tête de Yulia une bonne et une mauvaise chose. Au départ ce fut la pire des nouvelles, et elle est restée terrée chez elle de longues semaines. Au fond, la peur la dominait. Depuis, le nombre d'ennemis potentiels en rue a augmenté et elle a plus que conscience qu'il est dangereux que tout le monde sache. Surtout pour elle, qui est incapable de sa battre, même face à un humain. Yulia a toujours pensé que le secret était sans doute le meilleur moyen de survivre dans ce monde, vivre caché protège. Autrement, elle ne serait plus de ce monde.
Mais d'un autre côté avec la révélation est venu le True Blood et autre sang synthétique qui ont simplifié sa vie. Pour elle, perdue face à un humain et incapable de chasser, c'était la simplicité même. Plus besoin d'avoir recours à d'étranges marchés pour obtenir des pochettes de sang vu qu'on avait inventé quelque chose pour nourrir les vampires. D'ailleurs, son régime alimentaire est presque exclusivement composé de faux sang.
Yulia reste perplexe. Bien sur au départ, c'était effrayant puis une bonne chose. Mais aujourd'hui ? Elle pense de plus en plus que ce fut une grave erreur. Il n'y a qu'à regarder tous les ennuies et attentats survenus depuis la Révélation. Le monde est de moins en moins sure et de plus en plus effrayant pour la poltronne qu'elle est. Il est malheureusement trop tard pour revenir en arrière. Étant de nature à subir les choses sans combattre et par moment fataliste, elle accepte la situation et tente toujours de survivre au mieux. Mais jamais vous ne lui ferait dire que la Révélation était utile et nécessaire. Cela complique bien trop sa petite vie routinière.

✤ Signes particuliers
Yulia porte des lunettes. Oh pas qu'elle a des problème de vue loin de là, les vampires ont tous une très bonne vue mais celle accentue son petit air d'intellectuel et de rat de bibliothèque. Et elle trouve cela jolie.
Elle utilise son second prénom depuis qu'elle a échappé à son Sire, pas tant qu'elle pense ainsi se cacher mais parce qu'elle en préfère le sonorité douce et chantante.

Paris – 1976

Mon dos heurte violemment le sol. Quelques os craquent et une douleur diffuse se répand dans mon corps. Je reteins un souffle totalement inutile avant de gémir pitoyablement. Mes crocs ont déchiré ma lèvre inférieure et je peux sans me tromper dire que j'ai quelques os de briser. Néanmoins, la guérison s'entame lentement. Je me redresse doucement et fixe surprise le jeune homme face à moi. Je cligne des yeux. Cela aurait dû être simple. Tous les êtres de mon espèces savent le faire.

« Non mais faits toi soigner pauvre folle ! » Me crache au visage l'humain, qui porte sa main à son cou. Là où quelques minutes plutôt j'ai tenté de planter mes crocs.

Il avance vers moi, la colère irradiant de tout son corps. Je le vois serrer des poings. Et moi, pitoyable créature de la nuit, j'ai juste envie de fondre en larme devant ma bêtise. J’ai soif. Cela brûle ma gorge depuis quelques nuits. C'est lui qui m'a abordée et j'ai cru que ce serait simple. Je devrais pourtant pouvoir le faire. Le voyant approcher trop près à mon goût, je me relève et je fais ce que je fais de mieux en général : je fuis. Je courre plus vite qu'un humain, il m'est donc aisé de m'échapper et de trouver refuge dans une petite ruelle sombre. Je me laisse glisser contre le mur et je soupire. Ce n'est guère la première fois que j'échoue à me nourrir seule. À chaque fois que je tente le coup, je me retrouve dans la même situation. D'un autre coté, je n'ai que rarement eu à subvenir à mes besoins primaires. Mon Sire puis Vassily m’ont toujours fourni en sang frais. Le Conseil le fait en guise de paiement pour mon job. Mais tuer de moi-même ? Cela m'est impossible. Je suis si faible. Peut-être devrais-je chasser un chat errant....

Je secoue doucement de la tête et me relève lentement, les joues souillées de larmes rosées. Il ne me reste plu qu'à quémander un peu de sang ou a acheté illégalement une pochette de sang frais. J'ai trop soif pour attendre une nuit de plus.

Carpates vers 1800

J'ouvre les yeux et prends une profonde inspiration. Je tousse et gémis. Je regarde autour de moi, ne bougeant pas du sol où je suis allongée. Tout me semble étrange, plus net et précis qu'avant. Lentement, de peur que la tête me tourne, je m'assied sur le sol remettant correctement ma jupe blanche. Quelque chose cloche en moi. Je secoue la tête surprise et je porte ma main à mon cou. Je fronce des sourcils cherchant à me rappeler quelque chose qui m'échappe. Il n'y a rien sur mon cou. Quand je regarde mes doigts, il n'y a pas de traces de sang cette fois-ci. Et puis cela me frappe en plein ventre, et je me penche en avant, prise par surprise. Ma gorge est en feu. Elle brûle et pique atrocement, me faisant souffrir encore plus que ce que ma condition de femme ne m'impose chaque mois. Je gratte le plancher de mes ongles et je grogne. J’ai mal. Et j’ai soif. Je veux boire. La pensée devient obsédante et monopolise tout mon esprit. Je sens quelques chose frôler ma lèvre inférieure et je porte mes doigts à ma bouche. Sous eux, je sens d’étrange dents pointues telles le crocs de mon maître....

« Je voulais te voir morte pauvre idiote. » Déclare la voix grave du Seigneur Igmar. Je l'observe surprise, prête à fondre en larme et à reculer me cacher comme je le fais toujours depuis qu'il m'a achetée. « Mais ensuite j'ai pensé que si tu devenais mon Infante tu serais plus docile, que tu me céderais et que ce serait une excellente punition pour ton comportement. Néanmoins, je n'attends pas grand chose d'une poltronne dépourvue de personnalité... Je pourrais te jeter dehors, livrée à toi-même et t'observer te faire massacrer par les chasseurs et autres créatures.   Mais nous avons des lois, et je ne veux guère encourir la mort pour toi. D'autant plus que tu peux encore me divertir. »

Il quitte ma chambre quelques instant et revient avec une jeune femme. Il l'égorge d'un simple geste de la main, répandant son sang sur sa robe brune. Et puis il jette le corps face à moi. J'observe le liquide carmin avec envie à tel point que j'en salive. Et finalement, je me jette sur la pauvre malheureuse, qui agonise pour lécher le sang et boire à la plaie. Mes crocs tous neufs transpercent sa peau de nacre. Je gémis de plaisir et de contentement en buvant à la source le liquide rouge, qui a étrangement un goût très appétissant. Je ne suis pas stupide, même en n'étant qu'une paysanne dont la beauté lui a voulu de devenir servante, je sais ce que je suis. Cela fait quelques années que je vis avec mon Maître Igmar. Il s'est épris de mon corps et de mes traits fins, mais il n'aime pas mon caractère. Il a beau être aimable et m'offrir des présents, j'ai toujours eu peur de lui. Je me rappelle avoir été son calice, celle à la gorge de qui il s'abreuvait volontiers. Et puis, j’ai fini enfermé dans cette pièce. Jusqu'à la nuit précédente où de rage il s'est jeté sur moi pour me vider de mon sang et m'a donné après coup, semblerait-il un peu de son sang. Je sais ce que je suis : une Vampire.  

« Pourquoi ? » Je murmure en relevant la tête, curieuse et timide face à lui. Mais je ne reçois aucune réponse. Il se contente de quitter la pièce et de me laisser seule avec le cadavre face à ce que je suis devenue.

Shreveport – 2007

« Oh mon dieu ! Oh mon dieu ! » Je hurle presque hystérique (non en fait totalement hystérique, je ne me maîtrise plus du tout) et incapable de refouler la crise de panique.

Mes yeux ronds et exorbités fixent l'écran de Tv,  qui se trouve dans mon loft, chose moderne perdues au milieu des livres rares et précieux, que j'ai sauvé en fuyant Paris de manière bien lâche. Je porte mes mains à mes cheveux et mes ongles acérées labourent douloureusement mon crâne. Mais je reste imperméable à la douleur. Seule me parvient encore à l'esprit ce mot : Révélation. Il sonne comme une condamnation à mort définitive et dangereuse. Furtivement, je me relève de la position prostrée et je me dirige vers la porte d'entrée de mon loft. Je pousse difficilement la commode de l'entrée devant la porte. La peur seule me met en mouvement. Je ferme les lourdes tentures et je pousse divers meubles devant chaque fenêtre et portes donnant vers l’extérieure.

Finalement barricadée, je tourne mon regard clair vers la télévision où un Vampire explique que nous sommes réels. Personne ne lui a jamais dit que le secret nous protège? Soudain à la frayeur se mêle la colère en moi. Je rugis presque face à la bêtise de ce crétin qui vient de nous vendre à l'Humanité.

« Espèce d'abrutis ! » Les mots sortent en russe de ma bouche, car il met difficile de parler une autre langue en ce moment, que celle qui a bercé mon enfance humaine. « Tu viens de nous livrer au bûcher. Il faut franchement être dépourvu de raison pour aller raconter ça à des fanatiques, brûleur de sorciers et d'athées, à ceux qui ont déjà détruit une partie de nôtre avec l'Inquisition ! »

De rage, j'empoigne le vase se trouvant près de moi et je le jette de toute mes forces. L'objet de porcelaine percute l’écran de télévision dans un bruit assourdissant, réduisant en miette la face cristalline. Quelques étincelles électriques se répandent autour de l'objet alors que je hurle de colère et de désespoir. Je viens de détruit un vase plus vieux que moi et ayant orné Versailles ! Je cours me réfugier dans le seul endroit où je me sens bien et en sécurité. Fermant la porte de la bibliothèque devant laquelle je pousse un meuble. Je me laisse choir sur le parquet en hoquetant de peur, les pleurs nerveux déformant mon visage de poupée. Que vais-je faire maintenant ? Ne plus jamais sortir ? Combien de temps puis-je vivre sans boire de sang ? J'ai peur... Horriblement peur et je suis seule. Je pensais qu'ici j'étais en sécurité avec mes livres...

Moscou vers 1870

La fête est une réussite. Je souris amusée et comblée. Il y a plusieurs vampires, des marqués aussi et quelques rares humains. Tout semble simple depuis que je vis à Moscou sous la protection de Vassily. Je ne manque de rien et j'ai enfin quelqu'un capable de soutenir une conversation. Il m'a conseillé beaucoup de livres ne faisant qu’accroître mes connaissances et ce besoin devenu impérieux et insatiable de tout connaître. Je fends la foule délicatement allant droit à mon but. Finalement, je me laisse tomber plus ou moins gracieusement dans une sofa près de mon protecteur avec un énorme sourire.

« Je veux apprendre le français pour lire les pièce de Molière et les pensées de Pascal. » Je glisse à Vassily avec une voix enjouée et un brin enfantine. Mes yeux pétillent d'anticipation.

« Cela peut se faire Yulia. Je connais quelques vampires d'origine française.  Mais dis moi pourquoi t'intéresses-tu à ces auteurs ? » La réponse est donnée d'une voix chantante et posée, alors qu'il me tend un verre en cristal empli d'un liquide carmin chaud et copieux. Le Calice près de lui bande lentement son poignet. J'ai longtemps été une servante et un Calice pour un vampire.

« Un invité m'a assuré que Molière était un satire du règne de Louis 14 des plus amusants à lire et que Pascal avait une théorie sur la raison et la foi des plus intéressantes. Mais je doute que quelqu'un ait un jour traduit ces deux merveilles de la culture française en russe. » J'explique avec un doux sourire alors que je prends le verre et bois une gorgé de sang chaud.

Près de Vassily, je ne manque de rien. Je l'ai rencontré lors d'une piteuse tentative de chasse après mon arrivée à Moscou. Il s'est d’abord moqué de moi avant de remarquer ma répartie. Lire et contempler les collection de mon Sire m'ont apporté une très grande culture. Et il semble que peu des nôtres puissent tenir avec lui une longue conversation sur les sciences ou la religion. J'ai confiance en lui. Il m'apporte protection et subvient à mes besoins : tel que le sang ou les livres et autres collections.  Mes possessions personnelles s’agrandissent, mais rien ne satisfait pleinement cette soif de savoir en moi. Et puis, Vassily est un grand esprit, un Maître vampire régnant avec tact sur sa communauté mais aussi un épicurien qui aime les belles fêtes et tout ce qui est neuf. J'aime vivre ici.

« Sais-tu qu'il y a un vampire français ici qui t'apprendrais volontiers sa langue si tu te montrais plus encline à lui céder un tout petit peu. » Finit-il par me répondre. Mon regard dévie lentement vers le dit vampire.

«Je n'ai pas beaucoup d'appétence pour ce genre de choses... » Je confesse avec une moue boudeuse.

« Tu es une magnifique poupée de porcelaine, ma petite, mais bien plus froide et rigide qu'une bonne sœur catholique ! Tu en rends fous plus d'un à toujours repousser leur avances... Mais ma foi, j'ai peut-être quelqu'un qui assouvira ton envie d'en savoir plus sur la France. » Il concède finalement ce que j'espérais tant et j'offre à mon protecteur et maître un splendide sourire. Nous savons tous deux que derrière cela se cache la promesse de longues nuits de conversations intenses et passionnantes.

Shreveport – 2015

« Kira Lipovsky ? » Questionne la voix froide et neutre de l'homme, ou plutôt du vampire, assis à la table du Conseil.

Mes yeux observent rapidement la vaste salle où je suis rarement venue. En arrivant dans cette petite ville, je pensais pouvoir disparaître et vivre tranquillement entourée de mes bouquins et collections. Et puis il y a eu la Révélation, qui m'a effrayée avant que j'y trouve un intérêt. Pour moi, qui me retrouve inapte à chasser et tuer un humain, abandonner le marché noir du trafic de poches de sangs pour le True Blood fut aisé. Mais plus rien n'est aussi calme qu'avant. J'ignore où je pourrais me terrer pour survivre et me contenter de la compagnie de mes vieux livres. Je lèche mes lèvres sèches et je hoche lentement de la tête. J'ai peur. Face à moi se tient digne et fier le nouveau Maître de la ville. Il a une réputation à faire trembler chaque Canaïte de cette ville et ses alentours.

« On dit que tu as vécu à Moscou, que tu étais une amie intime de Vassily. » Continue-t-il et encore un fois j'acquiesce parce que c'est vrai et je commence à mordiller ma lèvre inférieure et à bouger des mains nerveusement. Mes tics d'angoisse prenne le dessus. « Il parait, et je le tiens de source fiable, que tu as servi de bibliothécaire au Conseil de Paris pendant près de 90 ans... Intéressant comme poste et assez révélateur quand on t'observe... »

Je remonte les lunettes, qui glissent un peu sur mon nez aquilin et de nouveau je fais un mouvement affirmatif de la tête. Je ne peux nier avoir tenu ce rang auprès d'un conseil, même si ce n'était guère de ma propre volonté et initiative. Néanmoins, j'ai passé des décennies au milieu des livres et j'ai pu lire et apprendre tout le contenu de l'immense bibliothèque du savoir vampiriques européens. Autrement dit, je n'en garde pas un si horrible souvenir que cela.

« Serais-tu muette ? » Questionne le Maître avec un froncement de sourcils. Mon premier réflexe est de secouer négativement la tête.

« Non... C'est vrai: j'ai rempli cette fonction. » Je murmure, totalement glacée de peur, tant est qu'un vampire peut être encore plu froid que la mort.

« Bien. On prétend que tu sais beaucoup de choses, sur divers sujets. Tu as la réputation d'un rat de bibliothèque, d'ailleurs tu en as l'apparence... Mais il parait que tu ne bois que du True Blood et que tu es totalement dépourvue de force. Un membre du Conseil a même prétendu que tu es incapable de tuer un humain pour te nourrir. Au fond, tu n'as que ton savoir d'intéressant... Est-ce vrai ? » Poursuit-il en se levant pour venir plus près et je fais instinctivement un pas en arrière.

« Je ne peux nier. » Est la réponse qui franchit mes lèvres.

« Alors pourquoi une vampire aussi insignifiante et inutile, dépendante de la protection du Conseil et des vampires plus puissants, incapable de subvenir à ses besoins vitaux vit-elle toujours ? Personne n'aurait-il eu la bonté de t'éliminer au cours de tes voyages ? » Ajoute-t-il et sa voix reflète plus la curiosité que l'animosité cette fois-ci.

« Parce que le savoir est une arme plus redoutable que la force physique » Je réponds en relevant fièrement la tête et en le fixant droit dans les yeux. « Vous l'avez dit, je sais beaucoup de choses, plus que vous ne pouvez imaginer et cela m'a toujours servi ! »

L’arrogance de ma réponse l'amuse plus que cela ne l'irrite, si j'en crois le sourire amusé qui naît sur ses lèvre pâles. L'ambiance de la pièce ses détend un peu et je prépare mentalement quelques répliques bien pensées et tournées pour lui prouver mes dire. Je peux jouer finement sur le terrain intellectuel voir le battre plus aisément que si nous devions en venir aux mains. Ce que je ne me souhaite guère parce que si un humain m'envoie au sol d'un simple coup et qu'un marqué réussi à me blesser, que peut réellement me faire endurer un Maître vampire ?

« Bien. Je sais tout de toi et de ton savoir, et il m'intéresse. Je te propose un marché. Bien que tu sembles dépourvue de force, tu as quelque chose qui pourrait m'être utile et que je ne peux conserver que si tu vis. Alors ce sera simple : tu deviens Conseiller et tu mets tes connaissances et vieux livres à mon service, et en contre partie je ferais en sorte qu'il ne t'arrive rien. Personne ne te tueras et n'attentera à ta non-vie. Cela me semble être un marché suffisamment correcte où nous y gagnons tous deux. »

Je dois avouer qu'il m'est difficile de refuser une telle offre. Je suis totalement incapable de quitter cette ville, le monde est en guerre et je n'ai pas vraiment les moyens de me défendre. Je lèche à nouveau mes lèvres et je fais mine de réfléchir. Finalement, je soupire, soulagée de m'en sortir à si bon compte.

« Bien. Je peux faire cela... Et c'est Yulia, je n'aime pas qu'on m'appelle Kira. » J’ajoute puisqu'il est vrai que depuis que j'ai fui mon Sire je n’utilise que mon second prénom.

Paris – 1919

« J'ai des nouvelles de Moscou pour toi si tu le désires. » La voix résonne dans toute la pièce, amplifiée par les vieux murs de pierre et les long rayons de livres.

Lentement, je relève la tête du parchemin poussiéreux du 14ème siècle que j'étais entrain d'étudier. Je fixe le Vampire, membre imminent du Conseil, que je déteste de toute mon âme. Enfin je n'en ai plus, mais je doute que le mot cœur soit un meilleur terme dans le cas des vampires. Je dépose la plume d'oie sur l'encrier et je me redresse pour paraître moins petite face à l'imposant Conseiller. Si j'avais su en le rencontrant ce qui m'attendait peut-être n'aurais-je pas jouer le jeu de la conversation intellectuelle. Comment ai-je pu être si naïve et imaginer que ce n'était qu'un petit duel tels ceux m’unissant à Vassily.

« Vois-tu, ici tu es protégée et n'as-tu pas tout ce que tu désires ? Des parchemins moyenâgeux, des livres rares et anciens... Tu accrois ta connaissance gratuitement. Je suis généreux avec toi ! »  Ajoute-t-il en s'arrêtant à mon hauteur.

« Vous avez dit que si je n’obéissais pas, vous me tuerais. » Je réplique d’une voix neutre, insensible au charme de mon aîné.

« Et je n'ai guère eu à le dire deux fois ! Tu as obtempérer directement. » Il plaque violemment ses mains autour du parchemin face à moi. « Vassily et sa cour ont subi la révolution russe eux aussi. Toi tu vis ici, dans la capital la plus culturelle au monde, terre de nos ancêtres et tu as accès à tout ce qui peut t'importer ici bas ! Parce que seuls tes collections comptent n'est-ce pas ? Tu es protégée et tu n'as que le mal que de passer tes nuits ici. Sincèrement, je me trouve généreux et j'ignore de quoi tu te plains. »

« Je ne me plains pas... Mais pour la reconnaissance, il faudra encore attendre quelques décennies, que le goût amer de votre menace quitte ma langue. Et vous le savez, nous n'oublions jamais rien. C'est encore plus vrai pour moi. » Je réplique sur le même ton, peu impressionnée. Il a besoin de moi autant que j'ai besoin de lui.

« Un jour, ma petite Yulia, tu me remercieras de ma gentillesse et de ma compassion pour toi. En attendant, le Maître aimerait que tu traduises plus vite ce vieux parchemin. » Réplique-t-il et il fait volte-face pour quitter la bibliothèque du Conseil. Je l'observe un moment, haussant les épaules avant de replonger dans la lecture passionnante du vieux texte en latin et à sa traduction.