Il est assez compliqué de décrire Lucy dans son intégralité, aussi un rapide tableau assez brouillon s’impose pour comprendre toutes les subtilités. Lucy est une espèce d’anarchiste, qui régit sa vie selon ses propres règles, ses propres envies. Elle ne se pose jamais trop de questions et est purement instinctive, presque autant que les sont les métamorphes sauf qu’elle ne vire pas poilue à la pleine lune. Lucy déteste mentir, aussi est-elle la franchise incarnée, du moins quand ça ne touche pas les affaires de cœur –qu’elle n’a pas eue depuis longtemps elle y veille. C’est ici que l’on approche d’un sujet sensible car si Lucy a, aux yeux de tous, un fort caractère malgré le fait qu’elle soit toujours un peu en retrait vis à vis de la masse –il lui arrive pourtant assez souvent de se distinguer par certaines actions d’éclats comme des bagarres plutôt violentes avec certaines personnes dont on ne citera pas le nom mais parfois Raziel exagère et qu’est ce que ça fait du bien- Lucy est une fille au cœur brisé. Plus jeune, elle a accordé sa confiance à un homme et lui a tout offert, cœur corps et âme, se laissant manipuler comme une idiote, mettant de côté sa méfiance naturelle car elle était tout simplement incapable de lui résister…Puis il a fait le geste de trop, en lui arrachant sa famille, et Requiem l’a poussée à s’enfuir. Sans doute serait-elle restée, sans cela, prise dans une spirale infernale. Avec le recul, son comportement la dégoûte et elle fait tout pour être forte, pour ne jamais laisser aucun homme pénétrer ses barrières. Mais c’est facile, avec le recul…Elle a peur d’eux, les hommes, mais elle a surtout peur d’elle-même, peur de ce dont elle est capable, et peur des conséquences néfastes pour tout le monde. Son ancien petit ami l’a manipulée pour avoir son pouvoir et quand ses parents se sont dressés sur son chemin, il les a tué. Etonnant, qu’elle soit paranoïaque, qu’elle manque de confiance en le monde et observe toute ces tueries de l’extérieur même si Aleksandr aurait pu lui accorder une formidable protection? Les psychopathe, Lucy en a eu sa dose et elle a ses propres démons à gérer, ses propres pulsions à contrôler. Son instinct la mène souvent dans des situations impossibles, où l’usage de ses pouvoirs est nécessaire pour s’en sortir, même si elle déteste cela.
Son parcours l’a forcée à développer un esprit retors, dangereux et calculateur. Elle ne laisse plus rien au hasard, non, pas une fois de plus et c’est peut-être de ce besoin maladif de tout contrôler que lui vient sa soif d’apprendre. La connaissance est l’arme la plus tranchante qui soit. Si les grands dictateurs avaient pris la peine d’étudier l’histoire, ils en auraient tiré des leçons concrètes. Lucy, elle, a compris la leçon, du moins le pense-t-elle. Etudiante solitaire, elle a des amies mais scolaires uniquement, et des humaines, pour éviter que l’une ou l’autre ne sente la magie couler dans ses veines, et peut-être la reconnaisse d’une quelconque façon. Parano, elle regarde par dessus son épaule et ne laisse pas la moindre trace susceptible de remonter jusqu’à Aislinn, son identité d’origine. Son seul véritable ami à qui elle ne cache rien ou presque, c’est Requiem, qui l’aide et la soutient si jamais elle approche du gouffre et manque de craquer. Pourtant, cela n’arrive quasiment jamais, car les épreuves ont forgé le métal jadis trop malléable de son cœur, et elle est devenue froide, ses yeux ont perdu toute trace de vie réelle et ne s’anime que très rarement. Son cœur a perdu sa lumière, sa chaleur, et il n’est pas près de la retrouver. Elle ne laissera plus le feu la caresser, et sa détermination lui semble inébranlable.
Durant la journée, Lucy va en cours. Elle est étudiante en histoire de l’art et ne manque jamais un seul cours, même parmi ceux qu’elle déteste, mettant un point d’honneur à apprendre un maximum de choses –don naturel avec lequel elle est plutôt doué. Lorsqu’elle n’a pas cours le matin ou l’après-midi, elle va travailler à la boutique de magie « Bouquins & Bibelots » en temps que vendeuse d’objets magiques et de grimoires divers. Elle passe en règle général le plus clair de son temps assise derrière la caisse à feuilleter un ouvrage poussiéreux, mais elle gagne relativement bien sa vie, de quoi, en tous cas, se payer son petit appartement. Parfois, il arrive à Lucy de sortir se balader dans la forêt, ou de fréquenter certains clubs humains, mais elle évite la foule le plus possible par peur d’être reconnue par une personne ayant partagé son ancienne vie, bien qu’elle soit très loin de Quantico.
◘ Lorsque Lucy se sent mal, elle créé une illusion autour d’elle pour éviter de trop penser.
◘ Elle a toujours un livre sur sa table de nuit et lit le soir avant de s’endormir, même si elle est épuisée. C’est un rituel important pour elle.
◘ Elle emprunte parfois des bouquins du magasin mais les remet toujours en place avant que quiconque s’en aperçoive. En même temps, elle gère presque seule la boutique.
◘ Elle triture sans arrêt son bracelet attaché au poignet gauche, qui renferme son familier.
◘ Elle s’habille toujours avec des couleurs sombres et a un style bien à elle. A chaque salaire qu’elle touche, elle s’accorde 50dollars pour aller s’acheter de nouveaux vêtements.
◘ Elle est fascinée par le mythe des dragons et lit tous les livres qu’elle trouve à leur sujet. Dans ses illusions, il est fréquent que ces animaux mythiques soient présents et son rêve serait de pouvoir en toucher un, réellement.
◘ Elle déteste la nourriture chinoise, car elle est toujours malade après en avoir avalé, peu importe d’où elle vient.
◘ Elle commence à s’intéresser à la magie du sang et consacre au moins une ou deux heures par semaine à son étude, quoi que peu approfondie. Ce type de magie la fascine et l’effraie tout autant, car il lui rappelle de mauvais souvenirs.
◘ Lucy aime le feu. Elle a toujours un briquet sur elle, et aime regarder flamber des morceaux de papier. Comme elle n’a pas de cheminée dans son appartement, elle allume souvent un feu dans une boîte en métal et se perd dans la contemplation des flammes. Cette fascination va de pair avec celle qu’elle ressent envers les dragons.
◘ Lucy aime la douleur, car elle se sent vivante par son intermédiaire. Masochiste, il lui arrive de s’interposer dans une bagarre simplement pour prendre un mauvais coup et pouvoir répliquer. Elle a déjà eu les os cassés plusieurs fois.
◘ Lucy a une frayeur compulsive des hôpitaux.
◘ Lucy ne supporte pas la fumée de cigarette et ne bois pas d’alcool. Elle ne veut pas devenir dépendante de quoi que ce soit, même ces choses insignifiantes, craignant toujours de perdre le contrôle.
◘ Lucy conserve une photo d’elle avec un autre homme du nom de Godric, soigneusement dissimulé dans le dernier tiroir de sa table de nuit, sous clé. Tourner la page est assez difficile pour elle.
◘ Il arrive à Lucy de souvent discuter avec son familier, Requiem, de l’époque où il était encore en vie. La culture que possède l’esprit fascine la jeune fille.
◘ Incapable d’avoir une relation sérieuse et encore moins de se laisser approcher, Lucy a tendance à repousser plutôt violemment tous les garçons qui s’approchent d’elle.
◘ Lorsqu'elle a été placé dans le programme, on lui a fait teindre ses cheveux blonds. Si elle les porte d'une couleur sombre, elle change continuellement de teinte. Parfois rouge, parfois noir, parfois auburn, parfois brun foncé, parfois court ou long, comme si elle ne parvenait jamais à se décider.
ILLUSIONS • Lucy est capable de créer des illusions plus vraie que nature. Elle peut vous persuader qu’il y a derrière vous un homme désirant vous tuer alors qu’il s’agit de la personne que vous aimez le plus au monde, elle peut se faire passer pour ce qu’elle n’est pas en un claquement de doigts, et ce pouvoir peut-être poussé à l’extrême en créant une sorte d’illusion cauchemardesque, qui l’épuise énormément et l’illusion a beau ne tenir que deux minutes et quelques secondes en tout, elle reste redoutable à affronter pour la psyché d’autrui. Autrui, oui, un terme vaste qui ne convient pas vraiment car son pouvoir est inefficace sur les sorciers et les lycanthropes dominants, quels que soient leur race. Ainsi, si un chef de meute veut l’empêcher de toucher à l’un des siens, et donc d’envahir la magie de la meute, il le peut. Evidemment cela les épuisera tous deux, mais le mal sera épargné. Par contre, son don fonctionne sur les vampires, quoi qu’elle n’ai jamais essayé sur un maître, sur les mediums, les humains et certains nécromanciens.
Notez que quand elle utilise son pouvoir, ses yeux deviennent totalement noir.
LECTURE D’ÂME • Lucy est capable de lire dans le cœur des gens mais elle ne peut pas tout y voir, pas encore. Il semblerait qu’après ses petites mésaventures, son pouvoir se soit centré sur le malheur et les peurs secrètes, les terreurs enfouies. Elle maîtrise ce pouvoir et ne lira jamais l’âme de quelqu’un de façon accidentelle : si elle le fait, c’est qu’elle veut faire mal, et elle utilisera son pouvoir d’illusion pour matérialiser votre cauchemar.
HYPNOSE • C’est son dernier pouvoir, qu’elle ne maîtrise pas très bien, voir pas du tout. Il s’est réveillé par hasard alors qu’elle se trouvait face à un vampire assez jeune, moins d’un an en tous cas, qui voulait faire d’elle son déjeuner. Elle lui a dit d’aller se faire foutre, en le regardant droit dans les yeux, et il a obéis…
SON FAMILIER • Requiem (son nom est un pseudonyme et il n’a jamais voulu lui révéler le vrai) est un noble anglais né au XVIIe siècle dans une famille de la haute aristocratie. Il a toujours été fasciné par les arts, la poésie, la littérature et les mystères du monde, ce qui le plongea très tôt dans diverses lectures dont certaines peu recommandables. Après s’être fais prendre en possession d’un ouvrage de sorcellerie, il a été enfermé par son père pendant plusieurs mois avant de parvenir à s’enfuir. Dans son périple, il rencontre un sorcier qui décèle en lui un potentiel magique qu’il décide d’exploiter, mais l’élève surpasse bien vite le maître qui tente, par jalousie, de l’assassiner. Requiem le tue par accident, en voulant se défendre et devient un vagabond des chemins. Il parcourra l’Angleterre, l’Irlande et l’Ecosse, se faisant des amis, des connaissances, et beaucoup d’ennemis dans les milieux occultes. C’est la qu’il rencontre une femme, qu’il aime et chéri jusqu’à ce qu’on la lui enlève. Il se met en quête de sa dame mais ne trouvera que son cadavre, qui aura servi à un rituel d’invocation. Fou de rage, c’est dans sa quête de vengeance que sa vie lui sera fauchée et le sorcier, un homme cruel, l’enferma alors dans le bracelet de sa bien aimée pour l’éternité, condamnant son âme à la servitude en tant que familier, si tant est que quelqu’un mette un jour la main dessus. Hélas pour le sorcier, cela arriva plus tôt qu’il ne le pensait car Requiem avait bien des amis, dont une en particulier qu’il aimait comme une sœur. Jeune fille de dix sept ans à peine à l’époque, elle intrigua jusqu’à venger son ami et trouva le bracelet enfermé dans un coffret. Incapable de briser le maléfice qui retenait son esprit dans l’objet et craignant de le briser, Requiem décida que, quitte à vivre éternellement autant être utile et ainsi toutes les sorcières de cette branche de la famille se transmirent le bracelet à tour de rôle, jusqu’à Lucy, qui le récupéra à la morgue, sur le cadavre de sa mère.
Aux yeux de Lucy, la révélation est simplement un rappel de ce que l’humanité entière savait déjà. Plusieurs siècles avant le leur, l’Eglise catholique brûlait des sorcières sur les bûchers, traquaient les vampires, et tous les humains le savaient, tous les humains se méfiaient de sortir le soir, calfeutraient leurs fenêtres à la pleine lune, épiaient leur voisine pour s’assurer qu’elle n’était pas une créature démoniaque. Puis petit à petit, ils ont oublié…Les vampires n’ont fais que rafraîchir la mémoire collective, en pensant peut-être qu’en se montrant par eux-même ils éviteraient le fiasco de l’Inquisition, qu’ils pourraient peut-être mieux manipuler les foules. Les conséquences que cela a entraîné sont certes consternantes mais si ça n’avait pas été la révélation, ils auraient trouvé un autre prétexte pour se faire la guerre. Alors à quoi bon en discuter ?
Lucy possède un tatouage magique représentant un dragon noir aux yeux rouges qui a été dessiné sur son dos, à l’origine, mais peut se balader sur tout son corps. Il sert à canaliser son énergie pour éviter qu’elle ne provoque des accidents magiques et seule sa propre volonté peut décadenasser la plus grosse partie de ses pouvoirs.

Il est la, juste devant lui. Il la regarde avec une infinie tendresse, écartant légèrement les bras, pour l’inviter à venir s’y blottir. Elle sent des larmes rouler sur ses yeux, alors qu’elle se précipite dans cette étreinte. Sa tête appuyée contre sa poitrine, elle sanglote et il lui caresse les cheveux. « Pourquoi… ? Pourquoi t’a fais ça ? » demande-t-elle, la gorge nouée, alors que l’eau s’écoule encore de ses yeux. « Ce n’est pas moi, ma chérie…Tu sais bien que ce n’est pas moi. Pourquoi est-ce que j’aurais fais ça ? » Elle relève doucement la tête, pour le regarder droit dans les yeux. Elle voulait déceler le mensonge mais, à la place, elle se perd dans son regard. « C’est vrai, pourquoi…Tu l’as pas fais… » murmure-t-elle, en essayant de se persuader mais une voix à l’intérieur de sa tête intervient. Sa propre voix. Tu sais que c’est faux, tu sais qu’il l’a fait, tu as vu leurs corps, et tu as entendu Requiem. Il l’a fait, il est coupable. « Je ne te ferais jamais de mal, jamais tu le sais…Jamais… » Elle acquiesce doucement, et se laisse bercer par la force de ses bras, se laisse endormir par l’impression de sécurité. « Non, jamais…Je sais. » Il ment, il ment ! Lâche le, il les a tué, il te les a enlevé, il t’a menti, il s’est moqué de toi. « Ils voulaient nous séparer. Tu voulais qu’ils nous séparent ? » Elle secoue la tête, avec force. Non, tout sauf ça, tout sauf la vie sans lui, elle en crèverait. Elle ne voulait pas qu’il la laisse, et quand elle s’était disputé avec eux à ce propos, bien entendu qu’elle était en colère, mais pas au point de vouloir ça, non…Maman…Papa… Leurs deux corps se matérialisent, froid, mort, un filet de sang s’échappant de la blessure fatale. Ils sont la, le regard fixe, fixé sur elle, et sans le moindre souffle de vie. Ils semblent dire : C’est ta faute ! Et elle crie, elle ne veut pas. Il la serre davantage, essaie de faire disparaître les fantômes. « C’est toi…Toi… » Elle l’entend sourire, elle le connaît par cœur. Elle sait exactement quel genre de rictus déforme sa bouche, face à cette accusation. Et le ton mielleux qu’il prend pour lui répondre est éloquent : « Et tu t’enfuis au lieu de les venger, tu t’enfuis, petite idiote, lâche, mais je te retrouverais tu verras…Je te retrouverais, tu ne pourras jamais m’échapper. Quand tu t’y attendra le mien, je réapparaîtrais dans ta vie, je viendrais la briser, et tu seras à moi, avec moi. » Elle se débat dans l’étreinte, veut s’en défaire à tous prix, mais il est trop fort. Elle veut le mordre, lui donner des coups, mais sa force minuscule ne suffit pas, alors elle crie, elle crie, et c’est la voix de Reqiuem qui la sort de sa transe : « Linn ? LINN ARRÊTE ! » Elle sursaute, et tout se termine.
La voiture se dessine à nouveau, ainsi que le paysage extérieur. Ils sont immobiles, les deux agents qui conduisaient tremblent comme des feuilles. Des larmes coulent sur leurs joues, comme sur celles de Lucy. « Arrête, Linn. Tu leurs as donné une illusion de tes sentiments, arrête ça, tu leurs fais mal… » Sa main fantomatique est presque réelle contre son épaule. Il se nourrit de son énergie pour paraître presque aussi vivant, mais personne ne le voit, hormis la medium, marshall fédérale, assise sur le siège passager. C’est elle qui a eu la présence d’esprit de les arrêter. « Pardon je…J’ai pas voulu…Pas fais exprès… » L’agent humain tente de garder contenance, la médium y arrive mieux que lui en essuyant ses larmes du revers de sa manche. Heureusement, elle n’était pas maquillée. « Aidez la à se contrôler jusqu’à ce qu’on arrive à Shreveport. De la, on avisera. » Requiem acquiesça, et resta assise à côté d’elle, la touchant sans la toucher. La tête basse, Aislinn s’en voulait pour cet accident, mais si elle n’avait que cela sur le cœur, elle s’en serait mieux portée. « Ce n’est pas ta faute, ce qui est arrivé. Tu n’y es absolument pour rien. » Il lui répétait ça en boucle depuis qu’elle avait passé la porte de la maison en rentrant du Lycée et trouvé ses parents. La pièce embaumait la magie, embaumait sa magie à lui. Elle se souvenait s’être figée sur le seuil, prise d’une terreur totale, puis d’avoir fais un pas, et un autre, avant de s’effondrer devant les corps sans vie de ses deux parents. Tremblante, les genoux dans une marre de sang, c’est son oncle qui a appelé la police en arrivant chez son frère, pour dîner. C’est en entendant les sirènes que Linn avait décroché le fermoir du bracelet de sa mère, pour le passer à son propre poignet. Ainsi était apparu Requiem, qui lui a raconté toute l’histoire. L’oncle était lui aussi sorcier, et s’était chargé de raconter les faits présumés à la police, sans toutefois dire d’où il les tenait. Il a accusé Godric, et on avait du placer Aislinn dans le programme de protection des témoins, car aux yeux de tous, manifestement, sa vie était en danger. Sauf qu’il ne me tuera jamais. Il me traquera, viendra me rechercher, parce qu’il a besoin de mes pouvoirs. Tout ça à cause de mes pouvoirs… « La dernière chose que je leurs ai dites, c’était que je les détestais, et que si je devais passer sur leurs cadavres pour être avec lui je… » Un nœud se forma subitement dans sa gorge. Elle avait l’impression d’avoir dormi, tout le temps qu’elle avait passé avec Godric, comme si elle était perpétuellement droguée. Elle savait que ça n’était pas le cas, elle savait qu’elle avait tous ses esprits, et que c’était les sentiments qui l’avait trahie. Elle le haïssait, et pourtant, elle se languissait de lui. L’illusion née de son cauchemar en était la preuve. Il était sa drogue, et elle entrait en cure de désintox. « Arrête de penser à ça. Le seul responsable, c’est Godric, et il paiera quand ils l’attraperont. » Sauf que Requiem savait aussi bien qu’elle que les autorités humaines ne pouvait rien, et que la Blanche Confrérie avait déjà assez de ses problèmes internes sans pour autant devoir s’occuper de cela. Ils allaient faire bonne figure, faire semblant au mieux, mais concrètement, personne n’allait l’arrêter, parce qu’il n’avait pas mis en danger le secret magique. Non, il les avait tué comme un humain tuerait un autre humain. C’était pour cela, que le sang avait tellement coulé…Il a tué comme un monstre. « Il faut que tu te ressaisisses et que tu contrôles tes pouvoirs, le temps de trouver quelqu’un qui pourra te tatouer quelque chose pour t’aider. » Elle acquiesça silencieusement et se tut le restant du trajet.



« Vous vous appelez Lucy désormais, Lucy Riddle. Vous devez oublier votre ancien prénom, votre ancienne vie, tout. Vous devez vous fondre dans la masse, éviter de vous retrouver sur une photographie ou face à une caméra. Le mieux serait de vous teinter les cheveux, de changer de coupe, de style vestimentaire, de tout changer et recommencer à zéro. Quant à vos pouvoir, je connais quelqu’un qui pourra placer un tatouage magique histoire de les canaliser, qu’ils ne se déclenchent plus par accident, mais si vous voulez un conseil…Essayez de ne jamais les utiliser. Ils sont bien trop reconnaissable. Si jamais vous avez un problème, si vous pensez qu’il est dans le coin, mon numéro est sur cette carte. Je passerais vous voir tous les mois jusqu’à votre majorité, et de la nous déciderons ensemble si vous restez ou non dans le programme. » Les mots de la Marshall tournaient dans sa tête alors qu’elle était assise sur un lit. Son lit à elle depuis plus d’un an déjà, et ensuite ? Lucy ne savait pas. Elle sortit de son sac les quelques affaires qu’elle avait emporté, dont un grimoire et un petit carnet bleu. Elle l’ouvrit, à la date du 7 Février 2009. J’ai rencontré un homme pendant ma pause de midi. Il était assis sur un banc, et lisait tranquillement. Je n’ai pas pu m’empêcher de regarder le titre de son bouquin, et j’ai su que c’était un sorcier, un vrai, comme moi, même s’il était plus âgé. Il a levé la tête vers moi en sentant mon regard s’attarder, et j’ai rougis d’un coup, en fixant mon sandwich. Il était plutôt beau, quand j’y repense, j’aurais du aller lui parler…Mais j’étais déjà en retard. Dommage ! Elle tourna ensuite la page, celle du lendemain : Je suis retournée au parc près de l’école. J’étais avec Anna, et l’homme était encore la. Il ne lisait plus le même livre pour le coup, mais il m’a souris quand on est passé devant lui. Anna ne tenait pas en place, et essayait de me persuader d’aller lui parler. Je n’osais pas vraiment…Il devait avoir dix ans de plus que moi, et peut-être d’avantage car les sorciers vieillissent moins vite que la moyenne. Puis qu’est ce que j’aurais eu l’air cruche, de l’approcher ! J’ai que quinze ans, et pas depuis très longtemps. Elle passa les pages, pour se retrouver deux semaines plus tard. Il a failli arriver une catastrophe aujourd’hui. Je me suis faite agressée par la bande de Caroline, qui a décrétée que j’étais « trop bizarre » et a fais de moi une tête à claque. Elle s’amusait à me critiquer au parc, quand Anna a repris pour moi, s’attirant ses foudres. Quand j’ai vu les larmes perler sur ses yeux, j’ai perdu le contrôle de moi-même et j’ai enfermé Caroline dans une vision d’horreur. Elle s’est mise à hurler, et je n’arrivais pas à arrêter ce que j’étais en train de faire, c’était horrible ! C’est la que l’homme du banc est arrivé. Il a posé sa main sur mon épaule et il m’a dis de me concentrer sur le flux de ma magie, de le couper net pour que ça s’arrête. J’ai essayé de visualiser, comme il disait et au bout de deux longues minutes, je suis parvenue à arranger les choses. Je crois qu’il a jeté un sort à Caroline pour qu’elle oublie. En même temps, elle tremblait tellement, elle bavait même, avec les yeux révulsés…Penser que c’était moi qui avait fais ça m’effrayait, et je pensais qu’on allait me voir comme un monstre, mais l’homme m’a rassuré en disant que c’était normal, puis il m’a donné le livre qu’il lisait, en me disant que ça m’aiderait sûrement mais que je ne devais le dire à personne. Il m’a fais un clin d’œil et est parti. Il est quatre heures du matin, j’ai lu le bouquin d’une traite, et j’ai vu un nom sur la page d’accueil : Godric. Ca doit être le sien…
C’était à partir de ce moment la que tout s’était enchaîné, et beaucoup trop vite. Elle avait attendu pendant deux heures au parc pour lui rendre son livre, et ils en avaient parlé. Comme il faisait plutôt froid, il lui avait proposé d’aller boire quelque chose, histoire de se réchauffer et elle avait accepté. Ils se voyaient beaucoup, ils discutaient beaucoup, et Aislinn se sentait étrangement en confiance et en sécurité avec lui. Si elle avait eu deux sous de jugeote, elle se serait méfiée de ces sentiments un peu trop rapide, mais elle était envoûtée et de fil en aiguille…J’ai fais l’amour avec Godric aujourd’hui. Oui je sais c’est dingue, j’aurais pas du et si maman l’apprend elle va me tuer, mais…C’est arrivé comme ça, par accident. Depuis le temps qu’on se parle maintenant, j’y peux rien…On s’est laissé emporté. Mais il a été plutôt doux au début, il me demandait si j’avais mal, et bon quand c’est passé…C’était magique ! Après ça, on a parlé…Il disait des trucs, à propos des sorciers, comme quoi on se laissait trop écraser par toutes les autres créatures. C’est vrai que la révélation…Yavais des rumeurs comme quoi les vampires allaient le faire, mais personne n’y croyait vraiment, jusqu’à ce que ça arrive. Je crois qu’il n’aime pas du tout ça, ni les vampires…Ni les cess en général en fait, seulement les sorciers. Il m’a dis qu’un jour les sorciers aussi seraient immortels comme les vampires et forts comme les loups-garous, sans dépendre de sang ou d’un animal. Ca m’a semblé une bonne idée…Surtout que les vampires aiment bien mordre des sorciers. Et ç’avait été de pire en pire. Quand je suis arrivée à son appartement, il y était, avec un vampire attaché. Il m’a demandé de lire en lui et de l’envoûter ensuite. J’étais pas certaine de pouvoir le faire, mais il a insisté, alors comme il me l’a appris, j’ai poussé ma magie hors de moi jusque dans le corps du vampire. J’ai lu en lui, j’ai lu profondément dans son cœur, j’ai vu ses peurs et ses vices, ses joies et ses peines, ses douleurs, j’ai tout vu. Il avait tué énormément de personnes, sans parler des autres choses horribles qu’il avait pu faire. Mais j’ai réussi à trouver ce qui l’effrayait le plus au monde, et mon pouvoir d’illusionniste s’est déclenché à ce moment la. Il s’est mit à hurler, mais l’appartement est insonorisé. Il a crié, pendant que je le maintenais dans l’illusion. Plus longtemps ça durait, plus j’avais mal à la tête et à un moment donné, je me suis évanouie. Godric était content, quand je me suis réveillée. Le vampire tremblait et gémissait, il l’a achevé d’un pieu en argent dans le cœur. Après cet épisode, plusieurs autres avaient suivi. Il poussait Aislinn à voir dans le cœur des gens, des victimes, et à leurs imposer les pires visions d’horreurs. Il choisissait toujours des proies plus puissante à chaque test. Il était contrarié mais sans doute un peu soulagé en constatant que ça ne fonctionnait pas sur les sorciers, mais très fâché qu’elle n’y arrive pas très bien avec les loups-garous. Il lui avait crié dessus comme quoi elle devait mieux s’appliquer, et elle était sortie de ses gongs, parce qu’elle avait ses règles. Il l’avait giflée…Puis s’était excusé et avait tout fais pour se faire pardonner. Le ton montait souvent entre eux, il la poussait au pire, à voir les plus infâmes choses dans le cœur des gens, au point de lui dérober son âme d’enfant. Le monde n’était pas beau, le monde n’avait rien de bon à offrir, vraiment rien, sauf si on le changeait en profondeur. Et cela, Godric voulait le faire…Et plus le temps passait, plus Aislinn voulait le faire avec lui. Seulement voilà, ses parents avaient appris qu’elle le fréquentait, et sa mère s’était mise dans tous ses états à la simple mention de son nom. A ce moment la, elle n’avait pas compris ce que ça impliquait réellement…« Il faut que tu t’en débarrasse, Lucy. » Même Requiem l’appelait par son prénom de remplacement, au cas où…Où quoi ? Peut-être pour éviter qu’elle se trompe elle-même. « Il est temps, maintenant. » Oui, il était temps. Elle avait le cœur en lambeaux, elle était incapable de faire confiance à quiconque ni de voir un seul rayon de soleil éclairer le monde dans lequel elle vivait, elle survivait…Et pourquoi est-ce qu’elle survivait, au fait ? Déprimée, d’humeur continuellement noire, défaitiste et triste à en mourir, Lucy était morte à l’intérieur, morte dans son regard. Elle existait à peine, s’était refermée sur elle-même. En lisant ce carnet, son regard s’était éclairé d’une jolie flamme, mais elle savait, au final, que même ses plus beaux souvenirs n’avaient été que des mensonges. C’était pourtant Godric lui-même qui lui avait enseigné la leçon : Le monde n’a rien de beau, les gens mentent, commettent des actes terribles, ils sont égoïstes et hypocrites. La réalité est pire que tous les cauchemars réunis, et on n’y peut rien…Sauf si quelqu’un change le monde en profondeur. C’était, en résumé, tout ce qu’il lui avait dis durant leur relation. Un peu plus d’un an, avant que tout ne bascule. « Ca restera dans ma tête. » murmura la jeune fille, alors qu’elle mettait le livre dans une boite en métal et craquait l’allumette. « Ca finira par s’estomper, si plus rien n’est la pour te le rappeler. » Lucy haussa les épaules, sans rien répliquer, et laissa tomber le bâtonnet enflammé. Sauf que la moindre inspiration me le rappelle, et c’est ça qui m’a tuée. Plus de cœur, plus d’âme, elle était aussi froide qu’un mort.


Elle avait allumé son ordinateur portable et travaillait sur un projet à rendre à la cafétéria. Elle était bondée, comme d’habitude, temps de midi oblige. Elle était en train de taper une analyse sur un tableau anglais du dix septième siècle –que corrigerait Requiem au cas où il y aurait des fautes- et ses amies discutaient garçons. Amies…Des amies scolaires. « Le plus beau mec de la promo, pour moi, c’est Joshua. Je sais pas, il a un côté…Sportif trop sexy, puis c’est le meilleur quater-back qu’on a eu dans l’équipe depuis…Super longtemps ! Et il a placé Miranda, donc c’est tout benef…J’ai envie de tenter le coup. » dit-elle en jetant un œil vers la table où mangeait l’équipe de football américain. Si Shreveport se défendait pas mal, ils n’étaient pas non plus d’un extraordinaire niveau et quand bien même, Lucy se fichait pas mal du sport et de ses conséquences. Elle était indifférente au charme de ces sportifs baraqués et les pom-pom girls avaient le don de lui taper royalement sur le système. « J’suis pas d’accord. Le plus sexy, c’est Raziel, sincèrement…T’a vu le style ? Beau gosse ténébreux, il sort jamais avec une fille mais il y en a toujours qui lui courent après, on sait pas exactement qui il est, ni ce qu’il est…Et franchement je le voyais pas marcher au soleil, j’aurais parié vampire. Mais c’est pas un mec normal…C’est super excitant je trouve ! T’en pense quoi, Lucy ? » Elle cessa de taper sur son clavier, l’espace d’un instant. « Mais t’es bête ou quoi? Ils peuvent pas se sacquer, ils se sont encore engueulé ya deux jours ! T’a vraiment pas de cerveau ma pauvre fille. » Les doigts de l’étudiante reprirent leur tempo sur les touches. Concentrée qu’elle était sur son écran, elle essayait d’oublier le regard du loup-garou qui lui brûlait la peau. A coup sur, il avait entendu la conversation des deux filles avec son ouïe fine et semblait curieux de voir ce qu’allait répondre la sorcière. Relevant les yeux, elle darda sur lui son regard inexpressif, teinté d’une once de colère. « Je pense que Raziel est un pauvre type voilà tout, un asocial compulsif qui doit son succès à sa belle gueule. Il serait né un peu moins beau, on le prendrait pour un geek et on en parlerait même pas. Le truc, c’est que le physique ça fait pas tout. Et je serais toi, Mary, j’éviterais de me frotter aux créatures surnaturelles, vu ce qui se passe en ce moment. » Sur ces mots, elle replongea sa concentration sur ce qu’elle était en train d’écrire. Il fallait avouer que les évènements à Shreveport avaient vite dégénéré, et si elle n’avait pas décidé de sortir du programme de protection à sa majorité, on l’aurait déplacé dans une autre ville, bien plus calme que Shreveport, déchirée entre les guerres vampires. L’extérieur n’était plus un endroit sur à la tombée de la nuit, pas pour les humains normaux en tous cas, et Mary était une humaine normale. Au mieux, sa fascination la ferait tuer. Au pire…Elle n’était pas sure qu’il y avait un pire. « N’empêche qu’il arrête pas de te fixer depuis tout à l’heure, et c’est souvent comme ça. Si on avait cours avec lui, j’suis sure qu’il arrêterait pas de te fixer…Tu sais ce qu’on dit. La frontière est mince entre l’amour et la haine ! » Oui, beaucoup trop mince. Lucy l’avait appris à ses dépends, dans son autre vie. Elle avait aussi appris que l’amour était un poison, et qu’elle ne voulait plus de cela dans sa vie. Elle sauvegarda son document WORD et éteignit son portable, qu’elle referma avant de le ranger soigneusement dans son sac. « J’vais prendre l’air. » murmura-t-elle et elle sentit le regard du loup-garou l’accompagner tout le long, jusqu’à ce que la porte se ferme derrière elle. En temps normal, elle n’en avait rien à foutre. Le problème, c’est qu’il était différent, et elle ne voulait pas qu’il le soit. Elle avait vraiment trop peur, qu’il le soit…Que quiconque le soit. Plus jamais se dit-elle alors qu’elle grimpait déjà les marches pour se rendre dans la prochaine salle de cours.
Plus jamais.