Calculateur, Oswald l’est depuis toujours. Il étudie toutes informations qui lui semblent pertinentes pour en tirer un maximum de profits. Il laisse peu de choses au hasard, aussi bien que très peu de ses coups sont des erreurs, mais un choix précis … Cela se couple bien avec son côté froid, qui fait de lui un piètre compagnon au quotidien, mais lui confère une impression tout sauf fausse de sérieux implacable. Cette froideur inexpressive est une défense, une muraille bien utile dans les affaires, comme pour agir sous l’égide de l’Essaim.
Le viking est particulièrement élitiste, car, empreint du sang, et donc de la logique du Voyageur par héritage, il considère tout autant les humains comme des êtres inférieurs, à maîtriser. Il ne l’est pas autant socialement parlant, mais n’est pas vraiment respectueux de ceux qui ont moins de pouvoir que lui.
Et lorsqu’il s’agit d’une mission en tant qu’agent de Belle Morte, ou d’une affaire de concurrence, Oswald sait révéler sa nature vicieuse. Il a un don inné pour la manipulation et les coups bas, qu’il tient directement de sa mère. Il ne l’utilise que contre un « ennemi », celui qui n’est définitivement pas de son côté, et qui n’y sera jamais plus …
A ce propos, le scandinave est particulièrement tenace. S’il se fait un ennemi, il est prêt à le combattre sans répit, sans fin. Cela marche évidemment du point de vue du travail : tout ce qu’il accomplit, il ne l’accomplit avec une moitié d’effort, sinon quoi il sera fortement frustré.
Enfin, Oswald et doté d’une qualité que peu lui donneraient en observant sa réputation de requin ambitieux : la loyauté. Il sait reconnaître sa hiérarchie, et lui être redevable de ce qu’il possède. Il a cultivé lui-même le grain, mais le tient du Conseil, sans qui il ne serait simplement rien. Alors jamais il n’a songé, bien qu’il soit libre de plus plupart de ses choix, trahir ses « créanciers ».
✤ Occupation nocturne
 Oswald a bâti cet empire médiatique grâce à l’acharnement. Chaque soir, lorsque Belle Morte ne le faisait pas quérir, il correspondait, de toutes les manières, avec les plus grandes entreprises de presse, insufflait intelligemment des investissements, achetait des actions à pris d’or. Aujourd’hui, il n’a quasiment plus qu’à entretenir cette toile immense, qu’il a tissée avec soin pendant des décennies, voire des siècles. Des appels, des courriers physiques comme numériques, avec les directeurs, les PDG, tout un système de communication qui lui permet de contrôler efficacement son empire. Et lorsqu’il ne commande pas, il s’informe, auprès des rédactions-même, des envoyés spéciaux, afin d’obtenir l’information avant tout le monde, et éventuellement la filtrer.
En quatre siècles d’existence, il a lu un nombre incommensurable de livres. Il lit absolument tout ce qu’il peut lire, tout ce qu’il peut obtenir. Et il peut obtenir pratiquement n’importe quel ouvrage, avec ses relations et son capital. La littérature fantastique, réaliste, policière, merveilleuse, religieuse, tout cela lui est tout à fait familier. Il en lit dans des langues différentes, celles qu’il a pratiquées au moins une fois dans son interminable vie. Le français, le danois, le suédois, l’anglais, l’allemand. Il n’en maîtrise que la moitié à l’oral, mais toutes lui sont connues à l’écrit.
Il joue régulièrement aux jeux de stratégie, tels que les échecs, les dames, et autres dérivés existantes dans le monde. Lorsqu’il trouve un joueur, qu’il soit de son niveau ou pas, il y passe volontiers des heures, tant que le joueur en question le suit. Il entretient ainsi son sens de la logique et de la stratégie, auquel il tient particulièrement. Peut-être sont-ce ces jeux qui ont façonné ce prédateur malin et redoutable. En tout cas, il dispose de tous les plateaux de jeux de stratégie à sa connaissance, en fait même une collection. Par ailleurs, en affaires ou en politique, il lui arrive parfois de calquer le vocabulaire employé dans les jeux, par exemple dans les échecs.
Enfin, lorsqu’il ne fait rien de tout cela, et c’est bien rare, il pratique du tir au pistolet. Bien qu’en principe, il n’en ait rien à faire, il a passé une licence lorsqu’il en a vu l’opportunité. Ce pouvoir s’octroyer le droit de s’entraîner dans des clubs : acheter un local d’entraînement n’est absolument pas hors de ses moyens, mais il préfère premièrement épargner son argent plutôt que de le dépenser, et secondement, il se dit que son réseau ne s’en trouvera qu’élargi. Mais son niveau est bon, peut-être pas autant que son niveau d’échecs mais tout à fait satisfaisant.
 
✤ Manies, habitudes & goûts
Il a pour indéfectible manie de faire « les cent pas ». Souvent quand il est seul, il marche de manière linéaire, le regard abandonné dans le vide. Cela signifie qu’il est complètement à sa réflexion, qu’il cherche la solution d’un problème, une directive à imposer, une méthode à adopter. Non seulement il est difficile de l’apostropher à ces moments précis, mais il faut se justifier brillamment de l’avoir fait, sinon quoi il est inexorablement contrarié.
Bien qu’il ait bu du sang de lycan au début de sa vie, dans un espoir de renforcement, ceci ayant torturé ses capacités gustatives, il est devenu peu à peu exigeant en matière de nourriture. En tout cas, il connaît bien assez la valeur des différentes variétés de sang. Comme un riche amateur de vins, il paye pour obtenir du sang, généralement du sang de sorciers. Il a ainsi contracté des accords avec certains d’entre eux, afin de pouvoir boire de ce sang particulier moyennant finances … Ou services.
 
✤ Discipline
Oswald dispose du pouvoir de vicissitude, de la manipulation de la chair et des os. Du fait de son âge avancé, il en est au niveau 4 (> 300 ans). Il est donc passé par les stades inférieurs, ceux de la sculpture de la chair et des os. Il maitrise avec brio ces phases de son pouvoir : modifier son apparence, celle d’une cible, déplacer et sculpter les os, il sait tout à fait le faire. A défaut d’avoir déplacé ses efforts vers la perfection des talents de prédation, il s’est particulièrement concentré sur sa discipline, et ces efforts se sont avérés payants. La finalité de cet entraînement intensif, il l’a trouvé en observant les réactions extérieures à propos de ces capacités. Il a alors compris que la peur qui découlait de son pouvoir est tout aussi utile que le pouvoir lui-même. Il est aisé de se faire une réputation et de s’assurer d’une loyauté intangible lorsque la terreur est de la partie. En inspirant la crainte par les pouvoirs qu’il possède, il a établi l’image d’un homme craint et respecté. Et après, ce pouvoir grandissant lui a donné une nouvelle capacité, par les ans et l’expérience. Une possibilité de mutation, de transformation monstrueuse et abominable. La contrôler fut assez douloureux et laborieux, mais après moult efforts, il a atteint une maitrise, bien qu’imparfaite, satisfaisante de son sujet. Cela dit, il n’utilise que rarement cet attribut plus qu’indiscret.
 
✤ Convictions
Oswald préférait vivre caché, ne pas attirer l’attention, l’admiration ou le dégoût de la race humaine. Il avait appris à vivre selon les traditions de l’Essaim, selon lesquelles se révéler fut longtemps un péché. Donc entamer une politique inverse lui paraissait aberrant, et plutôt stupide. Surtout en observant les conséquences qui en ont découlées. Il n’eut qu’à dire à ses compères, à propos des attentats à des assassinats en chaîne, qu’il fallait s’en douter. La seule manière efficace, selon lui, d’éviter des drames, aurait été de maintenir le secret. L’humanité est trop idiote et bornée pour comprendre les enjeux d’une rencontre du troisième type.
Mais cet avis, il se garde de le dire trop fort. Car cet Essaim dont il blâme la faute, il l’a sauvé d’une peine capitale, et lui a donné une chance, qui s’est avérée être la bonne. Le viking le sait, il doit la vie au Conseil, alors il sait aussi bien qu’il doit se taire pour ne pas courroucer sa maîtresse. De toute façon, la situation ne lui a pas été défavorable outre mesure. La découverte de sa nature de vampire a contribué à sa réputation fondée sur la férocité, la terreur, et la puissance. Quant à l’agrandissement de son empire, il ne s’est pas ralenti avec la Révélation, ou alors de manière tout çà fait négligeable.
 
✤ Signes particuliers Vous avez un tatouage ? Une cicatrice ? Peut-être qu’il n’y a pas que votre don qui vous rend différent, dites-nous donc ce que c’est. Facultatif.

Un jour d’hiver bien lointain, dans un village côtier plus lointain encore, naquit un enfant adultérin, caché aussitôt de tous. La mère était une roturière, et le père une sorte de pionnier de l’essor de l’activité de pêche sur les côtes norvégiennes. Mais sa mère était au moins aussi ambitieuse que son père. Ce dernier devenant relativement vieux pour l’époque, elle vit pour elle, comme pour son fils, l’opportunité de vivre dans une tout autre condition. Son petit, qu’elle nomma Anders, n’était pas du tout inclus dans le testament de son père, que ce soit à cause de la nature de leur filiation comme à cause de la concurrence de tous les fils légitimes. Sauf que la mère n’eut pas abandonné sur ces constats : il suffisait, en son sens d’éliminer cette concurrence et présenter son fils à la fin de tout ce jeu des trônes. Anders vécut alors son enfance dans l’ombre, enfant d’une union interdite, et fils d’une comploteuse sans remords. Sa mère ne lui enseigna rien de fondamental, ne sachant elle-même ni lire ni écrire, mais elle lui apprit les règles de jeux de stratégie tels que les échecs, développant ainsi sa logique et sa vivacité d’esprit. Il ne sut rien des agissements sombres de sa mère avant les environs de sa majorité, puisqu’elle se gardait de faire des témoins. Mais sa méthode comportait peu de failles, et elle fit tomber impunément les têtes des fils de son ancien amant.
 
Mais cela ne fonctionna pas jusqu’au bout. Les suspicions se multiplièrent à l’égard de cette roturière dont l’implication dans les meurtres massifs semblait évidente. Les enquêtes à son sujet débutèrent, et portèrent leur fruit en 1576, lorsque les enquêteurs trouvèrent chez elle une arme blanche qui ne pouvait qu’avoir servi à l’assassinat de l’une de ses dernières victimes. La tisseuse était tombée, son plan pharamineux avec elle, et elle fut rapidement mise à mort en place publique, au grand plaisir du père d’Anders, qui fit pression sur les autorités pour que le garçon meure avec elle. Le statut d’enfant adultérin et de complice d’homicide fut retenu, mais le fils ne connut pas la mort. Ils se contentèrent de l’exiler, le laissant pour mort dans les montagnes, pas encore bercées par le printemps. Anders savait ce que pouvait subir sa mère, mais ne s’attendait pas à ce qui lui était arrivé. Il vécut ainsi seul pendant un an, souvent sur la frontière de la vie et de la mort. La chasse lui sauvait la vie, mais sa condition physique, érodées par le froid, le rendait peu efficace. Cette année durant, il ne revit plus aucune société, vivait comme ses plus lointains ancêtres …
 
Mais au terme de cette année, il rencontra le premier humain depuis son départ en exil … Du moins il le croyait. Mais il avait rencontré une créature bien plus sombre. Cette dernière lui promit la garantie de survie à cet exil terrible, et Anders, en acceptant, survécut effectivement. Mais le vampire en fit un esclave, l’instrument  de sa volonté, et le garant de sa propre survie. Un gardien diurne, un appât pour la chasse. Car cette créature était un vampire, infant même du Voyageur. Mais il était un dissident, et se servait de ces montagnes scandinaves pour se cacher du courroux de son créateur. Il gardait toutefois de nombreux traits de son Sire : utiliser les humains pour ainsi servir ses intérêts, les marquer pour en faire des alliés plus efficaces. Anders fut donc marqué dans la décennie qui a suivi leur rencontre, et il a servi ce vampire fugitif pendant 17 ans. Mais son propre caractère s’est affirmé à partir de cette période. Un homme froid et calculateur, prêt à tout pour obtenir ce qu’il veut. Mais néanmoins intelligent. Il servit son vampire, nommé Rolf, sans contester une seule fois ses choix, mais fomentait une vengeance, pour s’octroyer la liberté. Lorsqu’il descendait dans les villages pour chercher les proies de Rolf, et lorsque ce dernier abandonna la télépathie pour éclaircir ses intentions, il mettait les dignitaires en garde de l’existence d’un monstre prêt à surgir des montagnes. Très vite, ils soulevèrent des masses paysannes armées, prête à déloger le vampire.
 
Son plan entra en pratique en 1594, lorsque Rolf Jakobsen prit conscience de la menace imminente. Anders savait pertinemment que la levée paysanne seule ne pouvait pas venir à bout de lui, mais ce n’était qu’un coup de bluff destiné à ouvrir une autre porte. Une nuit, alors que Rolf cherchait, paniqué, une solution pour s’échapper, Anders s’approcha et lui soupira : « En effet, un vampire n’arriverait pas à bout d’un tel problème … Mais deux ? ». Le vampire ne vit pas le traquenard, encore une fois. Et il céda. Le soir même, il lui fit l’Etreinte. Trois jours après, alors que Rolf était trop absorbé par sa méfiance envers l’extérieur, il le neutralisa d’un pieu dans le cœur, et le laissai à ciel ouvert. Il était libre.
 
A partir de cette année, il appartint au monde de la Nuit, duquel il ne savait rien d’autre que l’existence des vampires et des marqués. Mais il ne tarda pas à le découvrir, à la rencontre de vampires plus âgés, conscient du désarroi du nouveau-né. Il n’accepta pas d’être pris en charge, car il savait que s’il se rapprochait de l’Essaim, le Voyageur saurait qu’il a assassiné son Infant. Par la ruse, il esquiva les autorités vampiriques, et le plus de vampires possibles, ne prenant les conseils que de ceux qui s’étaient détachés de l’Essaim. Il vivait dans une infinie méfiance, conscient de l’ampleur que prenait la puissance du Conseil. Il errait dans les terres scandinaves les plus reculées, à l’instar de son créateur, en développant le maigre don dont il disposait, la Vicissitude, pour se torturer le visage. Comble de la sécurité, il buvait du sang de lycan, qu’il se procurait avec beaucoup de difficulté, pour se rendre, croyait-il, plus fort. En tout cas, il était impossible, méfiant et malin comme il était, de lui tendre un piège en son domaine. Il allait jusqu’à tuer de nombreux vampires qui avaient le malheur d’attiser sa méfiance très pointue.
 
Mais en 1658, il s’essaya à une pratique qui aurait provoqué sa mort définitive. Alors qu’il tua un vampire de plus, lui-même arrivé au siècle d’existence, il but son sang, commettant donc l’acte de diablerie. Cette fois, impossible de se cacher : son aura fut celui dont se drape un vampire qui boit le sang d’un autre vampire, donc il était trop intense et particulier pour que cette fois, le Conseil ne le remarque. Très vite, ses agents lui mirent la main dessus, pour l’amener devant leur jugement. Il fut d’abord décidé qu’Anders devait être incarcéré, alors il fut envoyer dans les cachots confortables de l’Essaim. Une fois de plus, il connut la misère et la solitude, sauf que le traitement carcéral était une nouveauté qu’il eut appréciée. Mais le fait de ne pas avoir à lutter comme il l’avait toujours fait pour sa survie lui plut sérieusement. Au lieu de fuir en permanence, le combat s’opère dans l’esprit. Et l’esprit d’Anders était déjà acéré, et vindicatif. Il méditait sans répit, réfléchissait à sa nature, au don qui lui était accordé, à ce qu’il était, tout simplement. Pourquoi fuyait-il ? Peu à peu, il considérait que cette vie qu’il avait mené était misérable, et s’imaginait que s’il pouvait y remédier, il changerait de direction. Et deviendrait un homme puissant et influent.
 
Au bout de 20 ans, en 1678, voyant en Anders à la fois un vampire peu dangereux pour eux, et par ailleurs un agent potentiel de par les qualités qu’il a démontré dans sa vie antérieure, le Conseil a pris une décision. Ils ne comptaient plus le mettre à mort comme il était prévu. Le Voyageur l’aurait voulu, mais les autres voulurent exploiter ce talent dont ils ne savaient que peu de choses. Belle Morte s’était notamment proposée afin de le prendre sous son aile. Mais ils débutèrent par un détail, qui, pour eux, avait une signification, qu’il ne connut jamais : ils le renommèrent Oswald Anders Landgraf. Comme pour effacer son passé et dédier entièrement l’homme présent à la cause du clan. Il aurait pu refuser, humilié par la domination du Conseil sur sa personne, jusqu’à effacer son identité ; il n’en fit rien. L’explication générale fut qu’il tenait simplement à la vie, mais en réalité, il vit en cette proposition l’occasion parfaite de se reconstruire, et effacer ce passé de survivant désespéré. Il se soumit alors à l’autorité de l’Essaim, et devint officiellement un agent du clan.
 
Belle Morte se servit de lui, toutefois, pour des intérêts plus privés que ceux pour lesquels on mandate un agent. En réalité, elle fit avec lui, comme avec tous les autres de sa « cour », ce qu’elle avait l’habitude de faire. Le genre d’activités pour lesquels Belle Morte est réputée. Mais Oswald vécut tout de même une autre vie, où il put s’instruire : ayant appris à lire durant sa période de fuite, il mit cela à profit durant ce temps pendant lequel il était chez Belle Morte. Il s’est cultivé massivement, sur un support littéraire très vaste.  Cela lui avait permis d’étoffer son sens de la logique, qu’il utilisa encore à foison, que ce soit dans des jeux que dans d’autres situations. Pour les autres, il exploitait plutôt son sens de la manipulation, ses facilités pour obtenir ce qu’il veut aisément, et se rendre indispensablement. Et c’est surtout ce talent que Belle Morte lui a reconnu. Il l’a même séduit, si spécial soit la signification de l’attirance chez elle. Elle en fit son amant, et une sorte de singe bon à faire des « farces » pour son plaisir. Ce qu’il fit sans problèmes, soucieux de tenir profit de cette collaboration. Au bout de 5 ans passés à ses côtés, il devint alors un véritable agent de Belle Morte, et donc du Conseil. Ses yeux, ses bras, il fut chargé d’informer la conseillère, et parfois d’éliminer des renégats qui lui sont dénoncés. Par ailleurs, il travailla à nouveau son don, le rendant plus précis, manipulant plutôt bien la chair, mais pas encore les os.
 
En 1739, après 56 ans de métier, et le début d’une initiation à la sculpture des os, ce fut un cas de vampire renégat qui l’amena à Paris, dans une université prestigieuse. Un tueur en série se faisant surnommer le Monstrum faisait régner la terreur dans Paris, et Oswald, fut chargé de l’occire, non pas pour sauver des vies mais surtout pour juguler le risque de la découverte des vampires. Oswald en savait peu en partant du Nord, mais au terme de filatures et de récolte d’informations, il devina que le vampire en question était plutôt jeune, à voir à sa façon d’agir, impulsive et sanguinaire. Ce viking-là n’était pas un combattant remarquable, mais en apprenant de son ennemi, il se battait comme si son adversaire l’affrontait avec ses poings, et lui avec une arme blanche. Car, à n’en point douter, son esprit est une arme plus que tranchante. Il alla alors à la rencontre du fameux monstre des rumeurs parisiennes, armée d’une dague attachée à sa jambe. Il valait mieux avoir une sécurité, et la dague était la meilleure dont il puisse se prémunir. Dans un couloir sombre, d’apparence déserte, il trouva le Monstrum dans l’ombre, prêt à surgir. C’est alors que le combat commença, long mais dominé par le norvégien. Il joua avec son cadet, comme pour attendre, la fatigue, puis, derrière un geste d’inattention, enfonça sa dague dans la carotide du malheureux, pour ensuite extirper le cœur de sa poitrine. Le vampire git alors dans une flaque de sang, qu’Oswald allait devoir nettoyer ultérieurement … Mais l’ennui n’était pas là. Il était à quelques mètres derrière lui, lui aussi dans l’ombre, le fixant avec curiosité. Un témoin. Le nordique se retourna vers l’intrus lentement, mais fut surpris par ce regard ni terrifié, ni confiant. Juste curieux. Avide d’en savoir plus, de savoir quel genre de spectacles se tramait devant lui, par quels acteurs il était joué. Et ce regard avait fasciné le viking. Au lieu de le tuer de sang-froid, il lui ordonna de s’en aller par l’ordre vampirique. Ce soir-là, il devait effacer les traces, mais il ne comptait pas en rester-là, mais bien en apprendre davantage sur lui.
 
Le lendemain, toujours le soir, il chercha alors ce témoin, qui l’avait tant intrigué. Il le trouva dans la bibliothèque, dans des ouvrages d’astronomie. Pour la plupart, il les avait déjà lus, lui. Les manuels scientifiques avaient, plus que beaucoup d’ouvrages, attiré son attention lors de sa période soif de connaissances. Il se pencha vers cet étudiant, assis mais tout de même imposant de sa taille, et jeta son regard profondément dans les écritures. Juste le temps de se faire remarquer du blond, pour ensuite lui dire :
 
« Bon choix d’ouvrage. »
 
Il s’installa à sa table, se présentant sous son nom ; mais ne dévoilant rien d’autre, rien qui ne soit vrai. Il voulait d’abord le connaître lui. Connaître ce garçon qui lui ressemblait bien trop en sa curiosité. Ils discutèrent des astres, Oswald se faisant passer pour un étudiant tardif. Mais au fil des mois, ils devinrent amis, complices, se découvrant le même esprit vif et curieux. Et peu à peu, le vampire approcha son acolyte du monde de la Nuit, le questionnant sur les sciences occultes, puis lui apportant des réponses, abstraites mais de plus en plus nombreuses. Jusqu’au jour où il dévoila, toujours en 1739, comme étant un vampire. Pas difficile à prouver, après tout. Oswald trépignait de pouvoir connaître la réaction de l’étudiant, Jürgen de son prénom, à propos de cette révélation. Et elle fut très intéressante pour le viking, qui la décortiqua étape par étape. Chaque émotion qui se bousculait les unes après les autres, il les voyait valser, se plaisait à cette place de spectateur. Il se reconnut d’autant plus dans ce jeune homme ambitieux, qui montrait peu à peu son admiration pour qu’était le norvégien. Et c’est ainsi qu’ils parvinrent à un accord diabolique, qui fit de Jürgen une créature de la nuit, transformée par Oswald.
 
Pendant de nombreuses années, le viking apprit à son Infant les us et les coutumes, ainsi que les principes de survie, des vampires. La chasse, la vie nocturne, l’apprentissage progressif du don qui était le même que le sien, il prit le temps de lui enseigner minutieusement, avec l’aval de l’Essaim. La seule condition était d’accomplir le travail avec le même sérieux, alors ce fut au gré des déplacements imposés par le Conseil qu’il fut le professeur et « père » de cet ancien étudiant, qui s’instruisait d’ailleurs toujours. Quant à Oswald, il se construisait une réputation remarquable dans l’Essaim, celle d’un agent efficace, craint et respecté. Rares étaient les cadets qui lui manquaient de respect, et les aînés qui ne reconnaissaient pas son travail de zélote. Son don de vicissitude s’élevait à un degré de maîtrise qui effrayait les plus jeunes du clan, tellement sa faculté de modelage de la chair et des os était précise. Sans même qu’il n’emploie sa force physique qui, seule, ne ferait pas trembler un ancilla, il disposait d’un pouvoir qui faisait forte impression. Jürgen était attentif à ses enseignements, plus encore lorsqu’il s’agissait de la vicissitude. Le norvégien appréciait cet enthousiasme, et s’adonnait avec plaisir à l’éducation du géant allemand, qui avait pris son nom de famille, Landgraf.
 
Mais l’année 1814 marqua un tournant dans leur complicité. Basés au Danemark depuis une dizaine d’années, Jürgen vit l’apparition des premières universités de cette région d’Europe, et y passa le plus clair de son temps. Oswald, entre missions et éducation vampirique, n’avait guère à se plaindre de sa situation, autant sociale que financière, avec le remplissage progressif de sa bourse par les salaires versés par le Conseil. Mais ce même Conseil fut tellement satisfait de la productivité du viking, surtout en ses terres natales, qu’il décida de l’attitrer à un poste plus prestigieux encore. Il fut alors envoyé sur la frontière dano-germanique, où il devint Maître de la Ville. Toutefois, son Infant, se complaisant en Scandinavie, ne voulut pas suivre son Sire, et ce dernier s’insista pas davantage. Il savait qu’avec environ 80 ans, il pouvait le laisser s’envoler. Sans trop de cérémonie, chacun partit de son côté, Oswald traversant le Danemark pour y tenir son poste. Mais ils gardèrent contact, par correspondance épistolaire notamment. De son côté, le norvégien assura ce pourquoi il avait été mandaté, avec la même poigne que celle pour laquelle il était tant connu dans l’Essaim. Il le fit avec tellement d’aisance qu’il se lança dans une autre tâche, cette fois plus personnelle. Constatant le début de la presse écrite, il tenta immédiatement de saisir le filon, voyant dans le domaine de l’information une opportunité d’élargir son pouvoir. Il lança un journal avec son capital conséquent, qu’il fit grandir jusqu’à devenir le journal le plus acheté de sa région. Il couvrait le Danemark, mais aussi certains Etats germaniques. Il fit ainsi grandir ses relations : des enquêteurs privés se rallièrent à lui, des rédacteurs et écrivains talentueux mais sans réelle carrière, mais aussi des vampires doués pour la récolte d’informations. Il obtint alors non seulement du chiffre d’affaires, mais aussi et surtout un réseau immense s’étendant peu à peu sur l’Europe, entre le monde humain et le monde de la Nuit. Il géra sa ville et cet empire naissant avec la sensation progressive de devenir ce qu’il voulait être, un homme puissant.
C’est au vingtième siècle, ayant racheté de nombreux journaux européens, et développé son réseau sur tous les continents, qu’il se heurta à un autre gros poisson : Victoria Landerman. Une revendeuse d’informations privée, espionne sans vergogne qui écrasait la concurrence coup après coup. Oswald eut affaire à elle quand il envisagea de développer plus encore ses affaires médiatiques en France, la terre natale de la vampire. Elle fit en sorte que les journaux achetés par le norvégien coulent les uns après les autres, puis tenta d’opérer de la même manière dans les pays voisins. Sauf que le viking ne l’entendit pas ainsi, et il fit en sorte, de son côté, que les vampires envoyés par Victoria soient attrapés et tués. Il eut l’accord de l’Essaim, puisqu’elle était une renégate, et bien qu’elle sût se cacher, elle ne cachait pas aussi bien ses agents. Il tenta de les faire parler, mais aucun ne parla, connaissant donc tous la mort sous sa main. Mais il nuisit fortement à l’activité de sa concurrente illégale, ce qui fit une rivalité titanesque entre ces requins, qui se battaient pour leur empire médiatique.
 
En 1940, le viking eut vent d’une aventure de son Infant, vagabondant sur le terrain de jeu de la Seconde Guerre Mondiale. Le Conseil, après l’avoir jeté dans les conflits, lui confia la garde d’un vampire. Oswald s’y opposa, farouchement, convaincu, selon le portrait du vampire qu’il lui a été fait, que Jürgen allait avoir des ennuis. Il conversa longuement avec Belle Morte, qui ne broncha pas une seule seconde. Enragé, il décida de surveiller plus encore l’allemand, voir s’il pouvait s’occuper de ce cas particulier. Mais le Conseil s’inquiéta presque autant que lui ; sauf qu’ils s’inquiétèrent, eux, de l’animosité de leur agent. Ils comprirent qu’un lien très fort unissait Oswald et Jürgen, comme un père et un fils : et le Voyageur, toujours peu fier du vampire de sa lignée, proposa de lui imposer un ordre qui les arrangeait amplement. Les empêcher d’entretenir ce lien étroit. Le norvégien tenta de refuser, et refusa pendant 2 ans, mais il comprit que le Conseil ne plaisantait pas ; qu’ils étaient prêts à poursuivre là où ils s’étaient arrêtés en 1688, ou au moins le déposséder de tout ce qu’il avait accumulé en ces quelques siècles grâce à eux. Le Voyageur en rêvait. Mais il céda, par pragmatisme, mais aussi parce qu’il ne voulait pas que son Infant subisse les conséquences de son refus d’obtempérer. Ce fut donc en 1943 qu’Oswald ploya le genou. Alors que Jürgen voulut le contacter quelques années plus tard, le Sire ne répondit que d’un silence mortuaire. L’Infant insista, mais il respecta les instructions, jusqu’à ce que Jürgen décide de ne plus essayer. Pendant une cinquantaine d’années, ils ne correspondirent plus ; mais le scandinave retourna son regard sur lui quelques décennies après, le surveillant grâce à son réseau d’informations …
 
En 2015, l’Oswald du seizième et dix-septième siècle était mort depuis bien longtemps. Il ne se souvenait plus du visage de sa mère, du nom de son village, ni même du nom de son Sire. Anders est mort, enterré dans les prisons de l’Essaim, froides et ténébreuses. Seul demeure Oswald, cet homme riche et puissant, craint et respecté, mais complètement asservi à un Conseil, contre lequel il ne peut plus rien. Du moins, il s’en est convaincu. Avec l’arrivée de nouveaux médias, (télé, radio, internet) il eut agrandi davantage son royaume de la presse, achetant des actions de chaînes importantes, en grand nombre, devenant un décideur des plus éminents du domaine des médias dans le monde. Il en tient pas le monopole, après tout rien n’est amusant sans combat ; mais il a évincé Victoria en 2007, en informant des chasseurs qui la traquèrent et détruisirent sa lignée. Elle a survécu, mais n’est plus une menace pour l’Essaim ; ni pour lui. Toutefois, cette année-là, il fut convoqué par sa protectrice, Belle Morte. Elle lui parla d’un assassinat, celui de l’un de ces Infants. Il ne connaissait pas la victime, mais elle, elle était possédée de rage, et voulait la tête du responsable. Et elle tenait la solution devant ses yeux. Après négociations avec ses collègues, elle obtint qu’Oswald soit nommé Shérif dans la ville où avait été tué son Infant, Tomas d’ Ombremont. Et la mission du nouveau shérif était claire : débusquer le coupable. Elle le savait, il était suffisamment intelligent, et doté d’un réseau d’informations assez vaste, pour arriver à ses fins. Pour obtenir sa totale coopération, elle lui permit de retrouver Jürgen, puisqu’il avait rejoint, dans l’année, la ville où il allait être envoyé. Alors le norvégien accepta sans hésitation. En quelques mois, il s’installa en ville, faisant savoir à son Infant qu’il était en Amérique, et recomposa une toile avec ses quelques relations en Outre-Atlantique. Connu dans tout l’Essaim pour être terrifiant, et réputé comme ayant d’innombrables relations, un véritable prédateur est prêt à réchauffer le siège du Shérif, bien décidé à faire ce pourquoi il a été mandé ici.